Une retraite de rêve

 

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par Annick WAECHTER

 

A notre époque, tout se « gère » : l’argent bien sûr, mais aussi les problèmes, le temps, les enfants, la famille ; et donc aussi la retraite !

 

 

Pour les plus jeunes, la retraite évoque entre autres du temps libre, une tonne de temps libre : ce qui signifie surtout aucune contrainte, ni d’horaires, ni de tâches à accomplir, personne à qui rendre compte, bref, du «tout loisir» où l’on jouit de tout ce dont on a dû se priver jusqu’alors. Et l’on rêve… Oui, l’on rêve, car ce n’est qu’un rêve.

Dans la réalité, il y a ceux qui atteignent en bonne santé et avec leur conjoint le jour « J » de la retraite ; mais il y a tous les autres, veufs, malades, au revenu très modéré, ceux qui ont à charge leurs propres parents (qu’on n’appelle plus « retraités »), tous les éclopés et autres boiteux qui sont aussi, eux, les fameux retraités.

 

Je n’en suis pas, moi. Mais je suis candidate à une retraite heureuse ! Et à y regarder de près, j’ai l’étrange impression que les retraités que je côtoie ressemblent à s’y tromper aux personnes « actives » qu’elles étaient ; comme si l’on ne se refaisait pas… Parce que notre vie se remplit de circonstances qui ne sont pas toujours celles que l’on choisit ou choisirait, et qu’il reste à chacun d’affronter – avec Dieu – ce que le Seigneur a en réserve.

 

Quand je l’ai rencontrée, j’étais trop jeune pour ne pas la croire très vieille. Sophie avait toujours le sourire, les yeux brillants, et des cheveux courts très blancs. Elle venait seule aux réunions d’Eglise la semaine, et au culte le dimanche avec son mari malade. Plus jeune, elle avait travaillé aux côtés de son époux, elle avait aussi élevé leurs enfants, et puis ceux-ci étant devenus adultes, sa porte était restée grand ouverte pour les petits-enfants. Quand son mari est tombé malade, elle en a pris soin, naturellement.

 

Née dans la fin des années 1930, Sophie n’était pas à la retraite quand je l’ai connue : mais ses occupations actuelles n’ont pas changé par rapport à cette époque.

 

Sophie est belle ! Vous savez, de cette beauté lumineuse, faite de douceur et d’intérêt pour les autres, et dont la clarté sur le visage émane d’une relation intense avec Dieu. Ne comptez pas sur elle pour débattre de questions théologiques, mais allez-y pour vous rafraîchir l’âme et le coeur.

 

Une fois, une seule, j’ai vu Sophie abattue, sans étincelle dans ses yeux remplis alors de larmes. A cette rencontre, elle m’a raconté son dépit de ne pas pouvoir faire plus pour Dieu, alors que sa santé le lui permettait : « Je m’occupe de mon mari, et ça me contraint à rester chez moi. Je prie à longueur de journée pour une foule de personnes, mais j’aimerais tant faire autre chose, de plus utile, pour Dieu. »

 

Quelques semaines plus tard, quand je l’ai revue, Sophie avait « retrouvé la pêche ». Elle s’est approchée de moi, radieuse, et m’a relaté comment elle avait compris que ce qu’elle vivait était LA mission que Dieu lui confiait : à la maison, elle avait le temps de prier, d’intercéder pour ses enfants et petits-enfants, pour les missionnaires, pour ceux qui en avaient besoin – et il y en avait beaucoup ! Et sa Bible, que je savais ouverte en permanence au salon, attendait Sophie dès qu’elle en avait la possibilité. C’était sa mission, confiée par le Seigneur, et qu’elle accomplissait avec la force qu’il lui donnait jour après jour.

 

Est-ce que je saurai, un jour, vivre dans la joie et la satisfaction la retraite que le Seigneur m’aura réservée ? J’aurai peut-être peu de choses à « gérer », et beaucoup à affronter ! Cela dépendra de ma relation avec Dieu ; tout comme maintenant.

 

Alors j’ai l’impression, dites-moi si je me trompe, que les retraités ressemblent à ceux qu’ils étaient « avant » ; et que celui qui apprend à vivre jeune et moins jeune pour Christ et dépendant de Christ, pourra aussi vivre sa retraite ainsi. Les yeux fixés sur Jésus, pour une retraite heureuse !

 

A.W.