Portez les fardeaux les uns des autres

 

par Robert SOUZA

 Robert Souza

 

« Portez les fardeaux les uns  des autres

 

et vous accomplirez ainsi la loi du Christ » Gal 6. 2

 

 

 

 

Quel fardeau ?

 

En motivant son propos, l’apôtre rend explicite le fait que son exhortation est une déclinaison ou, plus encore, une mise en pratique du commandement de l’amour. Mais des fardeaux il y en a de plusieurs sortes, même si nous nous limitons à ceux qui sont évoqués dans le Nouveau Testament. De quoi s’agit-il ici ?

 

Dans son contexte, cette exhortation a un rapport avec le péché : si quelqu’un vient à être surpris en une faute… Prends garde à toi-même, de peur que, toi aussi, tu ne sois tenté. A première vue, Paul contredit carrément le conseil de l’auteur de l’épître aux Hébreux qui écrit : rejetons tout fardeau et le péché qui nous enlace si facilement…1 Il faut regarder cela de plus près !

 


 

Au premier verset de Galates 6, Paul a utilisé le mot « redresser, rétablir » qui évoque l’idée de soulager et de soutenir. Celui qui commet quelque faute sur un coup de tête, lorsqu’il a pris conscience de son péché et s’en est repenti, a besoin d’être entouré. Il a besoin de trouver auprès de ses frères et sœurs en Christ la manifestation concrète du pardon et de l’accueil de Dieu. Nous pouvons entrevoir une solution à l’apparente contradiction notée plus haut, si nous disons : « Rejetons le péché, mais portons le pécheur. »

 

 

Le fardeau de notre faiblesse

 

Le fardeau que Paul vise en premier lieu dans Galates 6 est peut-être tout simplement celui d’être pécheur, le fardeau de notre propre faiblesse face au mal, de notre imperfection. Pour aider celui qui est tombé, dit-il, il faut d’abord admettre qu’on est soi-même vulnérable : Prends garde à toi-même, tu n’es pas à l’abri. Ensuite, nous avons besoin de cette lucidité que donne l’Esprit, car nous pouvons tous succomber au syndrome de la paille et de la poutre décrit par Jésus. Il est tellement facile de supporter chez nous ce que nous ne supportons pas chez les autres !

 

Le verbe employé par l’apôtre a le double sens de porter et de supporter. Supporter les fardeaux les uns des autres, c’est admettre que l’Eglise se compose de pécheurs graciés et qu’aucun des membres du corps n’est encore parfait. C’est reconnaître que mon frère, que ma sœur peut tomber… sans pour autant cesser d’être frère ou sœur en Christ.

 

Aux Corinthiens, Paul écrit2 : Car, tandis que nous sommes dans cette tente, nous soupirons, accablés.. . Nous n’échappons pas au fardeau de la condition humaine dans un monde abîmé par le péché. Mais nous nous soutenons mutuellement et nous encourageons dans la conviction que ce qui se voit est éphémère, mais ce qui ne se voit pas est éternel.3

 

 

 

Porter et non soupeser

 

Nuance intéressante, nous ne sommes pas invités à soupeser les fardeaux, pour décider s’ils sont vraiment lourds ou pas. Méfions-nous de notre tendance à mesurer les fardeaux des autres à l’aune des nôtres. Ce qui fait plaisir à Dieu, c’est de nous voir porter ces fardeaux, les supporter, les prendre en compte. Nous chantons quelquefois : « Dieu sait si bien ce qui te semble lourd. »

 

Admettons donc que certains puissent trouver lourd ce qui ne semblerait qu’une broutille pour d’autres. L’apôtre Paul nous encourage à prendre en compte nos différences, la grande variété qui se manifeste parmi les chrétiens. Nous n’avons pas tous les mêmes faiblesses, les mêmes soucis, mais nous en avons tous !

 

 

Apporter

 

Un texte de la première épître de Pierre nous invite non pas à porter nos soucis, mais à nous en décharger4. Cela nous rappelle que porter les fardeaux les uns des autres veut dire avant ; tout les apporter au Seigneur ensemble.

 

C’est en priant les uns pour les autres, les uns avec les autres, que nous nous encouragerons mutuellement à nous saisir de la grâce de Dieu qui est à la mesure de n’importe quel fardeau.

 

 

Pour aller plus loin…

 

Plusieurs passages du Nouveau Testament évoquent l’idée des fardeaux, de ce qui pèse, de ce qui est lourd :

 

  • Fardeaux liés au travail, Matthieu 20 : Dans la parabole des ouvriers embauchés à différentes heures, ceux qui ont travaillé le plus longtemps disent : nous avons supporté le poids du jour (Mt 20.12).

 

  • Fardeaux qu’on s’impose pour le bien d’autrui, Actes 15 : Car il a paru bon au Saint-Esprit et à nous de ne vous imposer d’autre fardeau que ce qui est indispensable (Ac 15.28).

 

  • Fardeau de la persécution : Paul avoue avoir été accablé à l’extrême par ses tribulations en Asie (2 Co 1.8).

 

  • Fardeaux matériels et financiers : La communauté chrétienne doit pouvoir assister au maximum les veuves qui n’ont aucun soutien. Les difficultés matérielles peuvent être de véritables fardeaux (1 Tm 5).

 

R.S

 

 

Nous ne sommes pas seuls, Dieu nous a donné des frères
et sœurs pour porter nos fardeaux dans la prière

 

Témoignage

 

J’ai en mémoire, deux faits-divers : tout d’abord ce bébé abandonné dans un photomaton. Seul dès son arrivée au monde ! Ensuite, cette femme, dépressive, retrouvée sans vie chez elle après plusieurs jours, un verre d’alcool dans la main. Seule pour quitter ce monde… Cette femme, je la connaissais ! Seuls, tous les deux. Pourtant entourés de tellement de monde !

 

Et nous alors ? Qui sommes-nous ? Juste des étrangers, voyageurs sur cette terre… Et pourtant, nous ne sommes pas laissés seuls. Jésus, avant de quitter ce monde, nous a rassurés. Avec son Esprit, il nous a donné des frères et sœurs. Avec eux, on peut partager nos fardeaux, recevoir un message depuis l’autre côté de la terre, d’un frère, d’une sœur, qui dit : « Je prie pour toi, je porte ton fardeau avec toi devant notre Père. » Cela m’est déjà arrivé à plusieurs reprises… Et là, je ne suis pas la seule non plus, n’est-ce pas ?

 

Marie-Christine PERRILLIAT

 


NOTES

 

1.  Hébreux 12.1

 

2.  2 Corinthiens 5.4

 

3. 2 Corinthiens 4. 18

 

4.  1 Pierre 5.7