C.E.I.E. : Évangéliser aujourd’hui

 

Rubrique de la Commission d’Évangélisation et d’Implantation d’Eglises (C.E.I.E.) des C.A.E.F.

 

 

Les conséquences de l’élection sur l’évangélisation

 

 

 

 

 

 

Par Jean-Paul Rempp

 
Dans l’épitre aux Romains, chapitre 11, verset 5, il est question d’un « reste selon l’élection de la grâce ». S’il y a un thème qui magnifie la grandeur et la souveraineté de Dieu, c’est bien celui de l’élection. La doctrine de l’élection nous aide à comprendre l’immensité de la grâce manifestée en Jésus-Christ. Elle nous aide à mieux adorer et à mieux servir le Dieu qui est réellement le Seigneur des Seigneurs, le Maître de l’Histoire et de nos vies personnelles.
 

En Éphésiens 1.4, nous lisons : « En lui (Jésus le Fils), Dieu (le Père) nous a élus avant la fondation du monde… » Avant même que le monde et qu’aucun homme n’existent, alors que, seul, il existait dans la perfection de son être, Dieu a souverainement décidé, et ce de façon irrévocable, de nous sauver et de faire de nous ses enfants d’adoption par le moyen de l’oeuvre rédemptrice de son Fils Jésus. Le salut a donc bien son origine en Dieu et non en l’homme. La doctrine de l’élection prouve, on ne peut mieux, l’absolue souveraineté de Dieu, mais, précisément à cause de cela, elle n’est facile ni à comprendre ni à accepter pour les êtres limités et pécheurs que nous sommes…

 
De tout temps, on a donc cherché à opposer le fait de l’élection au choix de l’homme. Autrement dit, à opposer la souveraineté de Dieu à la responsabilité de l’homme, comme si affirmer l’une de ces réalités excluait l’autre. Agir ainsi, c’est accepter une fausse problématique dans laquelle nos esprits corrompus et déchus sont plus que jamais disposés à s’égarer. En réalité, l’Écriture enseigne ensemble ces deux vérités1. Il s’ensuit qu’il faut les croire ensemble et ne pas les considérer comme des enseignements contradictoires. Comme le disait le célèbre prédicateur Spurgeon quand on lui posait la question : Comment comprenez-vous le mystère de la tension entre la souveraineté divine et la responsabilité humaine ? – « Il n’est pas nécessaire de réconcilier des amis ! »2
 
Les conséquences de la doctrine de l’élection dans le domaine de l’évangélisation sont multiples. En voici quelques unes :
 
 
 

Une nouvelle motivation

 
La foi en l’élection et en la souveraineté de Dieu ne change rien à la nécessité d’évangéliser. C’est en effet généralement par la prédication de l’Évangile que Dieu a choisi de sauver les pécheurs.3 En évangélisant, nous entrons donc dans le plan de Dieu. Ainsi, c’est en réponse à l’Évangile annoncé par les membres du peuple de Dieu, tous appelés à être ses témoins, que les élus viendront au salut que Dieu leur a préparé.
 
Prenons donc conscience que Dieu a probablement préparé des personnes dont, comme Lydie en Actes 16.14, il « ouvrira le coeur » pour qu’elles s’attachent à ce que nous leur dirons. Le même Esprit qui nous guidera vers ces personnes, qui se révèleront être des élus lorsqu’elles se convertiront, travaillera également en elles et les rendra capables de croire et de comprendre au moment décisif.
 
Ainsi, l’assurance que Dieu était souverain dans la grâce permit à Paul de ne pas perdre courage et lui donna de l’espoir pour croire que son travail ne resterait pas sans effet. Il était persuadé que là où Christ envoie ses messagers avec l’Évangile, c’est là qu’il a son peuple qu’il veut sauver. Notre confiance devrait être la même que celle de Paul.
 
S’il nous arrive d’éprouver un sentiment de découragement face à l’immense tâche à accomplir ou face aux difficultés du terrain, comme c’est fréquemment le cas en France, rappelons-nous que Dieu ne nous demande pas de sauver notre pays. Ce qu’il nous demande, c’est de prêcher fidèlement l’Évangile. Dieu se chargera lui-même de sauver ceux qu’il a élus depuis toujours. Peut-être ce genre de pensées nous permettront-elles d’échapper à certaines frustrations, voire au désespoir, et même de devenir de meilleurs instruments entre ses mains !
 
Lorsque nous annonçons l’Évangile à des incroyants, soyons pleinement convaincus de l’importance de notre ministère aux yeux de Dieu, à la fois pour le temps présent et pour l’éternité.
 
 

Une nouvelle urgence

 
La foi en l’élection et en la souveraineté de Dieu ne change rien non plus à la nécessité pour l’homme pécheur de répondre à l’invitation de l’Évangile et de venir à Christ pour expérimenter sa miséricorde. Mais comment un homme corrompu par le péché pourrait-il comprendre la nécessité de la conversion et à plus forte raison la vouloir ? La réponse se trouve dans cette merveilleuse prière qu’Éphraïm adresse à l’Éternel : « Fais-moi revenir et je reviendrai » (Jér. 31.18).
 
Le devoir de tout pécheur non régénéré est de se tourner vers Christ dans le repentir et la foi pour être sauvé. Mais pour qu’il en vienne à crier : « Mon Dieu, je suis désespéré, sauve-moi par ta grâce », il doit au préalable se reconnaître incapable de se sauver et savoir, psychologiquement, que son salut dépend de Dieu. Tel est le moteur, la conviction qui le pousse vers Christ.
 
Ainsi, le pécheur qui se sait perdu ne pourra pas venir de lui-même, mais c’est Dieu qui lui en donnera la volonté ; il est aveugle, mais c’est Dieu qui le conduira, lui qui dit : « Je ferai marcher les aveugles sur un chemin qu’ils ne connaissaient pas » (Es 42.16).
 
Aussi lorsque nous présentons l’Évangile, n’oublions pas d’exhorter notre interlocuteur à demander au Seigneur de faire en lui par son Esprit ce qu’il est incapable de faire par ses propres forces. La rédemption est bien une conséquence de l’élection et non l’inverse.
 
Puisse Dieu nous accorder le discernement nécessaire chaque fois que nous présentons l’Évangile !
 
 

Une vie de prière renouvelée

 
Dans son livre L’évangélisation et la souveraineté de Dieu4, J.I. PACKER a écrit : « La prière n’est pas une tentative faite pour forcer la main de Dieu, c’est un humble aveu de faiblesse et de dépendance. Quand nous sommes à genoux, nous savons que ce n’est pas nous qui contrôlons le monde… Chaque fois que nous prions, nous confessons à la fois notre impuissance et la souveraineté de Dieu. »5
 
La façon dont nous prions pour la conversion de ceux que nous avons à coeur témoigne également du fait que nous considérons en réalité Dieu comme réellement souverain en ce qui concerne le salut. Ce que nous faisions jusqu’à présent spontanément, maintenant que nous comprenons mieux l’importance de la doctrine de l’élection et ses implications dans l’évangélisation, ne devrions-nous pas le faire avec plus de ferveur et de persévérance encore ? Prions pour « ceux que nous voulons gagner à Christ, afin que le Saint- Esprit illumine leurs coeurs ; et pour nous-mêmes, ainsi que pour tous ceux qui prêchent l’Évangile, afin que la puissance et l’autorité du Saint-Esprit soient sur eux. »6
 
 

Un appel efficace

 
Rien ni personne, pas même les pires circonstances ni Satan lui-même, ni même le péché de l’être humain éternellement aimé, n’empêchera Dieu de sauver une personne qu’il a élue au salut. Job 23.13 le rappelle avec force : « Mais lui, s’il prend une décision, qui pourra l’en faire revenir ? Ce que lui-même désire, il l’exécute. »
 
Christ lui-même enseignait que cette oeuvre de Dieu est universellement nécessaire : « Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire. » Il enseignait aussi qu’elle est universellement efficace : « Quiconque a entendu le Père… vient à moi. » En plus, il enseignait que la réponse à l’appel de Dieu est universellement certaine en ce qui concerne les élus de Dieu : « Tous ceux que le Père m’a donné viennent à moi » : ils entendront parler de moi et ils seront amenés à croire en moi. C’est là le dessein du Père et la promesse du Fils.
 
 

Tout est possible

 
S’il est vrai que le salut vient de Dieu et que c’est Dieu qui régénère, la conséquence merveilleuse c’est qu’aucun homme n’est trop corrompu, aucun homme n’est trop « pourri » pour pouvoir être sauvé. Si c’est l’Esprit qui régénère alors tout est possible, car tout homme, même le pire des pécheurs, a la possibilité d’expérimenter la grâce et de se convertir. La doctrine de l’élection est réellement pour nous une source d’encouragement. Elle nous invite à nous engager résolument et avec hardiesse dans l’évangélisation et le témoignage, dans la foi que nul coeur n’est trop dur, nul pécheur n’est trop endurci pour le Dieu Tout-Puissant. Il peut faire ce que nous sommes incapables de faire dans la vie des hommes ; n’en restons donc jamais aux réactions premières de ceux auxquels nous apportons l’Évangile.
 
Comme l’a bien résumé J.R. Packer, « la souveraineté de Dieu dans la grâce est le seul élément qui peut nous donner un espoir de succès dans l’évangélisation… Au lieu de rendre l’évangélisation inutile, la grâce souveraine de Dieu est justement ce qui, seul, l’empêche d’être inefficace. »7
 
J-P.R.
 

NOTES
 
 
1. Voir par exemple Lc 22.22 ; Ac 2.23 ou Ph 2.12-13.
 
 
2. Cité in BRINK Egbert, « La prédestination et la liberté humaine peuventelles faire bon ménage ? », La Revue Réformée n° 244 – 2007/5 – Octobre 2007 – Tome LVIII, pp. 67-83, p.83.
 
 
3. Voir Rm 10.12-17.
 
 
4. (Mulhouse : Grâce et Vérité, 1968), 127 p.
 
 
5. Ibid., pp. 9-10.
 
 
6. Ibid., p. 117.
 
 
7. Ibid., p. 101.