Chef d’entreprise

 

 interview

 

Interview de Beat Lehmann

 

   Propos recueillis par Reynald KOZYCKI

 

 

 

 

 

1) En quelques mots, quelle est ta formation professionnelle et les différents emplois que tu as eus ?

 

J’ai fait mes études à l’Ecole Supérieure de Commerce de Saint-Imier dans le Jura bernois, puis à l’Institut International de Management (IMD) de Lausanne. J’ai ensuite travaillé comme traducteur, puis comptable et je suis entré dans l’entreprise GMAC Banque, pour en devenir PDG France depuis 1993.

 

2) Comment présenterais-tu cette entreprise ?

 

GMAC est un des principaux établissements financiers dans le monde depuis 1919. Il est détenu à 49% par General Motors. Il est présent dans 38 pays. Cette entreprise comprend actuellement 38.000 employés dans le monde. En 2006, les profits nets ont dépassé les 2,5 milliards de dollars.
 

3) En quoi consiste plus précisément ton travail actuel ?

 

En tant que président directeur général de la banque et président du conseil d’administration, mes principales responsabilités sont, en interne, de définir la stratégie de la banque à moyen et long terme avec les membres de la direction, et en externe je dois faciliter le développement de la banque soit par une croissance organique ou par des acquisitions en vertu de la stratégie fixée…
 

4) Qu’est-ce que cela signifie pour toi « Etre chrétien à son travail » ?

 

Depuis que je suis chrétien (né de nouveau), ma vie s’oriente clairement sur Jésus-Christ, et je n’ai plus aucune crainte de l’avenir. Même quand les incertitudes veulent m’accabler, il n’y a pas le moindre doute non plus que Dieu me veut du bien. J’ai appris que tous les défis de la vie personnelle, professionnelle, mes victoires, mon honneur n’ont pas à être essentiels. Ma confiance croissante en la puissance universelle du Créateur de ce monde m’a aussi libéré de la pression qu’entretient l’obligation d’être bon ou le meilleur aux yeux du monde.
 

C’est ainsi que je peux m’attaquer aujourd’hui de manière calme, sereine et décrispée à des tâches lourdes de responsabilités et à de gros défis. Alors, l’enjeu du chef d’entreprise chrétien aujourd’hui va au-delà du simple succès. Il doit avoir à coeur de comprendre les autres, démontrer, traduire et à mettre en pratique les valeurs sûres que sont l’amour du prochain, l’humanisme, la justice et la confiance. A son contact, dans sa zone d’influence, tous doivent pouvoir découvrir et expérimenter par son intermédiaire ce que produit la foi. Sinon, nous refusons à nos semblables la clé de leur recherche de sécurité, d’orientation et de paix du coeur.
 

5) Tu assures aussi des responsabilités dans ton Eglise locale et au-delà… Quels principes te semblent importants pour essayer de concilier une vie professionnelle, une vie familiale et une vie d’église ?

 

C’est un sujet auquel il est difficile de répondre. Quelle est la bonne mesure ou la répartition saine entre la famille, ses propres loisirs et l’Eglise ?
 

Je pense que ce temps doit être réparti selon l’appel divin, mais il peut varier d’une personne à l’autre car il n’y a pas de modèle imposé ou à suivre ; seul le Seigneur décide. Il utilise les uns et les autres selon Sa volonté, en fonction de leurs capacités, leurs qualités et leurs dons. En ce qui me concerne personnellement, depuis toujours, j’ai plutôt ressenti le besoin de m’engager pour les autres, au sein d’une Eglise et d’associations chrétiennes, au service du prochain, soit par le soutien financier ou le soutien moral et spirituel…
 

Un vrai chrétien qui vit sa foi dans la vérité ne peut pas rester indifférent à ce qui se passe dans l’Eglise et dans le monde, il ne peut pas rester passif ou simplement « consommateur » le dimanche matin. Dieu veut aussi que nous soyons et restions de bons maris et de bons pères sinon, comment pourrait-il nous confier une mission simple si nous négligeons ce qu’il nous a confié de si précieux qu’est la famille ! Le Seigneur est bon et, bien sûr, il veut notre bonheur. Quand le temps me le permet, je peux aussi m’adonner à mes passions que sont la course automobile et le golf.
 

6) Tu interviendras au prochain congrès des CAEF en mai 2007 sur le thème du « leadership » … Comment vois-tu spontanément le « fonctionnement » et le « caractère » d’un leader ?

 

Le « leadership » est un sujet fascinant et complexe doté d’une littérature importante. Avec un peu d’ironie je pense qu’il y a autant de types de « leadership » qu’il y a de troubles comportementaux chez les hommes, tant dans le domaine professionnel qu’associatif et cultuel. Certains pensent que seul l’Esprit doit diriger l’Eglise alors que d’autres prétendront qu’elle doit être dirigée avec autorité par des hommes de Dieu fidèles à la Vérité…
 

Alors quel type de leadership ? Pierre écrit : « Faites paître le troupeau de Dieu qui est avec vous, non par contrainte…, mais de bon coeur ; non en tyrannisant…, mais en devenant les modèles du troupeau. » (1 P 5.2-3) Le leadership est donc biblique, mais il y a de bons et de mauvais bergers (leaders) ! Le berger doit entre autres rassembler le troupeau et pas le contraire. Bien sûr, ce leader vit une vie intime avec Dieu ; c’est-à-dire, il entretient une relation verticale pour être ensuite capable de gérer sa relation avec les autres, la relation horizontale.
 

Sur les qualités du serviteur, les mots qui me viennent à l’esprit sont intégrité, honnêteté, bienveillance, amour pour le prochain, conviction, écoute, responsabilité, respect, encouragement, soutien des plus faibles, enthousiasme…