L’interprétation des prophéties bibliques1

 etude-bibliqie

par Reynald KOZYCKI

 

 

 

 

Plusieurs « prophéties bibliques » sont relativement claires, comme la conversion du « reste d’Israël », l’enlèvement de l’Eglise, le retour glorieux du Christ, la résurrection, le jugement, les nouveaux deux et la nouvelle terre… En revanche, il est plus hasardeux d’en établir une chronologie et d’interpréter certains textes. Différentes constructions ont été élaborées dans les siècles passés. Pour simplifier les choses, on retient en général quatre approches différentes, qui d’ailleurs se focalisent surtout sur la question des « mille ans » en Ap 20.1-61.

 

 

1. Le prémillénarisme

 

La majorité des pères de l’Eglise attendait un retour personnel du Christ juste avant le règne de mille ans (d’où le mot pré-millénarisme). Ce fut par exemple le cas de Papias (qui a connu l’apôtre Jean), Justin, Tertullien, Irénée… Ce millénium, dont l’Ancien Testament ne parle pas directement, était mentionné dans les textes apocalyptiques juifs. Une restauration du paradis y était annoncée, un grand sabbat devait s’accomplir ; après 6000 années de vie sur terre, la « semaine » devait s’achever par 1000 ans de bonheur.

 

 

2. L’amillénarisme

 

En réaction à trop de détails – parfois farfelus – sur ce millénium, Augustin, d’abord prémillénariste, rejoint l’interprétation d’un certain Tyconius. Ce dernier décrivait le règne millénaire de Christ comme la période actuelle de l’Eglise. Dès lors, Augustin qui croit aussi au retour personnel du Christ, développe l’idée que les « mille ans » doivent être pris symboliquement. Les Réformateurs adopteront une vue légèrement modifiée de l’amillénarisme : le millénium était la période dans laquelle ils vivaient. La libération de Satan décrite en Ap 20.7 représentait l’avènement de la papauté médiévale.

 

Ces Réformateurs attendaient donc un retour imminent de Jésus avec le grand jugement. Par la suite, l’amillénarisme sera adopté par un nombre significatif de protestants évangéliques. Ils soulignent le fait que le millénium n’est mentionné que dans un seul texte biblique. Plusieurs passages semblent mettre au même niveau chronologique le retour du Christ, la résurrection et le jugement2 . Pour eux, la victoire du Christ à la croix a permis de lier l’homme fort, c’est-à-dire le diable3 , d’où l’insistance sur l’aspect immédiat du Royaume de Dieu.

 

 

3. Le postmillénarisme

 

L’abbé Joachim (de Fiore) élabora au 12e siècle un autre système eschatologique. Pour lui mille ans de prospérité et de paix précéderaient le retour du Christ (d’où l’expression post-millénarisme). Une partie du protestantisme reprit ses théories, comme Thomas Brightman pour se développer au 17e et 18e siècles dans le mouvement missionnaire évangélique. Pour eux, le millénium se produirait par le moyen de la prédication de l’Evangile. Cette prédication conduira à la conversion du monde et préparera le règne du Christ. Les Réveils étaient vus comme les prémices de ce millénium. Cette approche sera ensuite reprise par les théologiens libéraux du 19e faisant du Royaume de Dieu une simple amélioration morale et sociale du monde. A partir de là, l’aile évangélique sera méfiante de cette interprétation.

 

 

4. Le dispensationnalisme

 

Dès le 17e, en réaction contre le post-millénarisme, Joseph Mede s’en démarque en suivant plus littéralement les textes bibliques : le retour de Christ et la résurrection précèdent le millénium. Cette approche sera reprise début 19e pour gagner progressivement un nombre important de chrétiens évangéliques. Darby, dans le cadre du mouvement des Frères, développa le système dispensationnaliste vers 1840, comme une variante du pré-millénarisme. Pour la première fois dans l’histoire, Darby met en avant la doctrine de « l’enlèvement secret » de l’Eglise avant le retour de Jésus et, entre autres, décrit un destin très particulier d’Israël pendant le millénium. Ces deux derniers points ne sont pas repris dans le prémillénarisme historique où la transition du chapitre 19 à 20 d’Apocalypse semble plus naturelle,

 

Si tout n’est pas dévoilé avec précision dans les Ecritures, suffisamment d’éléments nous permettent d’attendre et de hâter l’avènement du jour de Dieu… (et) d’attendre selon sa promesse, de nouveaux deux et une nouvelle terre où la justice habitera. C’est pourquoi, bien-aimés, dans cette attente, efforcez-vous d’être trouvés par lui sans tache et sans défaut dans la paix.4

 

R.K.


NOTES

 

1. Parmi les sources nombreuses, citons Jules-Marcel NICOLE, Précis de doctrine chrétienne, Editions de l’Institut biblique de Nogent, 1983 ; Collectif, Le règne de 1000 ans sur la terre, Editions Cifem, 1982 ; Alfred KUEN, Le labyrinthe du Millénium, Editions Emmaüs, 1997 ; Le grand dictionnaire de la Bible, Excelsis, 2004 ; R. J. BAUCKHAM,  » Millenium «  in New Dictionary ofTheology, IVP, 1988 ; Donald GUTHRIE, New Testament Theology, IVR 1981 ; Charles, RYRIE, Le dispensationnalisme, hier et aujourd’hui, Le Messager Chrétien, 1997, htrp://www.bibliquest.org/Auteurs_divers/Ryrie-Dispensationa-lisme.htm#TM5

 

2. 2 Pi 3.10-13

 

3. Mt l2

 

4. 2 Pi 3.11-13