Un humain : plusieurs parties ?

 

 

Par Marie-Christine FAVE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Que le Dieu de paix vous sanctifie lui-même tout entiers ; que tout votre être, l’esprit, l’âme et le corps, soit conservé sans reproche à l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ ! » (1 Th 5.23)

 

 

En première lecture de ce verset, l’impression donnée est celle d’une composition de l’homme en trois parties. L’arrangement symétrique des trois noms « l’esprit et l’âme et le corps » avec leurs articles et les ‘et’ (kai) amènent certains à considérer l’énonciation distincte des parties comme une explication naturelle.

 

Cependant : « Ce texte serait le seul dans les lettres pauliniennes et même dans tout le Nouveau Testament à proposer une division tripartite de l’être humain. »1. Nous trouvons par ailleurs des paires de mots pour désigner la personne : corps et âme (Mt 10.28) ; corps et esprit (1 Co 5.3, 7.34) ; chair et esprit (2 Co 7.1) ; notre homme extérieur et notre homme intérieur (2 Co 4.16)… Le mot âme représente parfois la personne entière (Gn 2.7) parfois la vie (Lv 17.11, Mt 6.25).

 

Le verset 5 de Deutéronome 6 demande d’aimer l’Éternel de tout son coeur, de toute son âme et de toute sa force. Jésus reprend ce commandement en employant les termes traduits par coeur, âme et pensée (Mt 22.37) ou coeur, âme, force et pensée (Mc 12.31). L’intention ne semble pas ici d’analyser l’humain. Il s’agit davantage d’aimer l’Éternel intensément, de tout son être, et cela est envisagé sous différents aspects.

 

De même pour 1 Th 5.23, certains comprennent que « l’expression l’esprit, l’âme et le corps sert ici à désigner la personne humaine tout entière plutôt qu’à distinguer ses différentes composantes. »2

 

Un humain : plusieurs mots…

Comme nous l’avons mentionné précédemment, la Bible utilise différents termes à propos de l’homme. Et la question se complique encore quand on considère qu’un mot peut correspondre à plusieurs mots dans une autre langue.

 

L’âme : « Les mots hébreu néphech et grec psuché, rendus le plus souvent par âme en français ont, eux aussi, des significations fort diverses… l’âme est le siège de la peine et de la joie, de l’amour et de la haine, de la crainte et du désir. »3 Ainsi l’âme représente souvent la vie intérieure avec les émotions, les désirs, le caractère personnel.

 

L’esprit : « Il est aussi comme l’âme, le siège de la vie affective… En revanche jamais ce terme n’est employé pour désigner l’être humain tout entier dans sa carrière terrestre. »3 L’esprit de l’homme connaît ce qui concerne l’homme (voir 1 Co 2.11).

 

Le coeur : Selon Christopher WRIGHT, il est surtout « le siège de l’intellect, de la volonté et de l’intention. Vous pensez dans votre coeur, et votre coeur façonne votre caractère, vos choix et décisions. »4 Le coeur peut aussi contenir des émotions (joie, peine), du courage (2 S 17.10), de la confiance (Pr 31.11).

 

Le coeur, même s’il n’est pas visible, se manifeste : « Car la bouche de chacun exprime ce dont son coeur est plein. » (Lc 6.45)

 

Quant à la pensée, « l’hébreu n’a pas de terme précis pour désigner notre personnalité intellectuelle. »3Il va prendre le même mot que pour coeur. De même, « l’hébreu n’a pas de terme usuel pour désigner le corps. »3Il utilise le même terme que pour chair. Néanmoins, le grec a un terme courant sôma pour le corps.

 

Ce bref aperçu, bien qu’incomplet, montre un peu la complexité de l’être humain, la difficulté pour le décrire. La Bible fait appel tantôt à un aspect de notre personne, tantôt à un ou plusieurs autres. Au niveau de la relation avec Dieu, l’âme, l’esprit, le coeur, l’intelligence peuvent être mentionnés. À titre d’exemple, Asaph parle d’ « une génération dont le coeur n’est pas ferme, et dont l’esprit n’est pas fidèle à Dieu. » (Ps 78.8). Paul veut prier et chanter par l’esprit, mais aussi avec l’intelligence (voir 1 Co 14.15). Et le Psaume 42 exprime le désir de l’âme :

 

« Ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu ! Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant… » Heureusement que Dieu voit l’élan de notre coeur sans que nous ayons tout à analyser.

 

Hébreux 4.12

Ce verset mentionne trois paires de mots : âme et esprit ; articulations et moelles ; réflexions et pensées du coeur. Certains y voient « une accumulation rhétorique de termes servant à exprimer tout le mental de l’homme sous tous ses aspects. »5 La comparaison de ces paires d’expressions peut aussi fournir quelques éléments. Pour la dernière paire, s’il s’agissait de discerner entre deux grandeurs, il faudrait qu’existe entre ces deux mots « une distance suffisante pour permettre une classification, ce qui n’est pas le cas. »1 d’après Samuel BÉNÉTREAU. Le passage se concentre davantage sur l’efficacité et la pertinence de la Parole de Dieu : elle va jusqu’à pénétrer et discerner l’intimité et la complexité de notre personne.

 

Des questions demeurent, des interprétations diffèrent aussi quelque peu. L’être humain, corps, âme, esprit, coeur, pensée… reste complexe. Notre compréhension est limitée, même en ce qui nous concerne.

 

MC.F.

 

 

Une langue est un
filet jeté sur la réalité
des choses. Une autre
langue est un autre
filet.
Il est rare que les
mailles coïncident.

 

Phrase d’introduction au
Nouveau Testament
Interlinéaire Grec / Français

 

 


NOTES

 

1. François BASSIN, Les épitres de Paul aux Thessaloniciens, Edifac, 1991.

 

2. Notes de la Bible : Vie nouvelle.

 

3. Jules-Marcel NICOLE, Précis de doctrine chrétienne, Editions de l’Institut Biblique, 1983.des Interlinéaire Grec / Français

 

4. Commentaire sur le Deutéronome de Christopher WRIGHT

 

5. F-F. BRUCE, cité par Samuel BÉNÉTREAU, L’épitre aux Hébreux, tome 1, Edifac, 1989.