« Le Seigneur lui-même, avec un cri de commandement, avec la voix d’un archange, avec le son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et ceux qui sont morts dans le Christ se relèveront d’abord. Ensuite, nous, les vivants qui restons, nous serons enlevés ensemble avec eux, dans les nuées, à la rencontre du Seigneur, dans les airs ; et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur. »

1 Thessaloniciens 4.16-17 (Nouvelle Bible Segond)

 

Par Sylvain Aharonian

 

 

Si nos contemporains ont bien assez de leur quotidien, les chrétiens de Thessalonique attendaient jadis l’avènement du Seigneur (v. 15) et s’inquiétaient du sort des croyants décédés. L’apôtre, se fondant sur la tradition évangélique, les assure alors que les chrétiens de tous les temps seront un jour réunis autour du Christ ressuscité.

 

 

Un retour remarquable

 

Jésus reviendra en effet dans son corps, de sorte à être vu. D’augustes signes, rappelant les théophanies ou les jugements de l’Ancien Testament, accompagneront d’ailleurs son retour : « voix », « trompette », « nuées » (cf. Dn 8.15s. ; És 27.13 ; Ex 19.16). Cette présentation doit-elle être tenue pour symbolique, comme l’affirme par exemple C.A. WANAMAKER1, ou doit-elle être prise au sens littéral ? Il n’est pas facile de trancher. L’intention de Paul n’en est pas moins claire : « donner quelque goût de l’apparence magnifique et pleine de révérence de ce grand Juge »2.

 

 

 

Un retour ajourné ?

 

De l’heure du retour, l’apôtre ne nous dit rien. En écrivant « nous, les vivants », ne trahit-il pas néanmoins son attente de la parousie pour sa génération ? Il importe surtout de saisir qu’il « s’exprime… comme le fait naturellement tout chrétien, en chaque génération »3 : son langage n’a rien d’étonnant et ne signale pas l’entretien d’une illusion. Paul s’appuie d’ailleurs sur une parole du Seigneur (v. 15), qu’il ne tord certainement pas : or le Seigneur ne s’est lui-même pas trompé, il n’a pas annoncé son retour pour les quelques années qui suivraient sa Passion (cf. Mt 25.5 et Ac 1.7) ! N’en déplaise à certains, Jésus ne s’est pas mépris sur l’heure de l’établissement du Royaume.

 

 

Un retour pour les corps

 

L’apôtre déclare que ceux qui sont morts dans le Christ ressusciteront les premiers ; ils seront ainsi avec le Seigneur. Certes, les chrétiens décédés sont déjà en relation avec le Seigneur, si bien qu’ils entendront son appel ; dans l’état intermédiaire, avant le retour du Christ, les chrétiens vivent, pleinement, la vie qui a éclos en eux quand ils ont été régénérés, quand ils sont ressuscités spirituellement (cf. Jn 5.24 et Col 3.1). Cependant, pour « enviable »4 que soit déjà leur situation, elle n’entame pas la gloire de l’espérance de la résurrection corporelle (cf. Jn 5.29 et Col 3.4) : alors les croyants décédés vivront avec leur corps dans la présence du Seigneur ressuscité.

Quant aux chrétiens qui seront vivants lors de la Parousie, ils seront enlevés, soudainement et souverainement. Alors le Seigneur changera leur corps corruptible en le configurant à son corps glorieux (Ph 3.21), pour que le mortel soit englouti par la vie (2 Co 5.4).

Ainsi ressort l’importance que la Bible accorde au corps, à l’opposé d’un spiritualisme qui s’oppose à la matière. La vie en plénitude promise par Dieu concerne aussi le corps ! L’Écriture distingue d’ailleurs soigneusement l’être corporel

– et plus généralement le créé

– et le mal, qui provient du dedans, du coeur des gens (Mc 7.21).

 

 

Un premier retour ?

 

L’événement annoncé en 1 Thessaloniciens 4 se rapporte au retour du Christ pour les saints, décédés ou vivants : le Seigneur enlèvera alors son Église. Faut-il dissocier de cela le retour du Christ avec les saints, que l’on identifie au jour du Seigneur (1 Th 5.2) ? Rien n’est moins sûr ! La Parousie qui soulagera les croyants peut fort bien coïncider avec l’application du châtiment aux rebelles (cf. Jn 5.28s.). A. KUEN est du reste catégorique : « Il est impossible de distinguer, sur la base des textes bibliques, une attente qui ne concernerait qu’une partie de l’événement total. »5

Selon les tenants de la distinction critiquée, le premier retour du Christ serait secret, invisible, contrairement au second, quelque temps plus tard : cette idée est apparue vers 1830, dans l’entourage d’E. IRVING. Pourtant, l’enlèvement dont Paul parle doit survenir alors qu’un cri, une voix et un son de… trompette retentiront : il semble peu probable que ce bruit ne soit entendu que des croyants !

Au reste, le mot apantèsis, traduit par « rencontre », évoque l’accueil que, dans la société hellénistique, d’éminents citadins réservaient jadis à un souverain : ils sortaient au devant de lui pour l’escorter sans délai jusque dans la ville (cf. Ac 28.15s. et Mt 25.6). Selon la logique de cette image, il n’y a pas lieu de séparer d’une part la réunion du Seigneur et des croyants et d’autre part l’établissement du règne du Christ. Certes, il n’est pas impossible de rapprocher la « rencontre » annoncée par l’apôtre de celle organisée par Moïse « au bas de la montagne » en Exode 19.17 ; dans ce cas, l’argument de l’escorte à l’époque hellénistique ne joue plus…

Si Paul ne satisfait pas entièrement notre curiosité, il ne laisse planer aucun doute sur l’essentiel : nous serons toujours avec le Seigneur ! Son retour corporel nous le rendra présent comme jamais depuis son Ascension et nous communiquera sa victoire sur la mort. Maranatha !

 

S.A.

 


NOTES

 

1. The Epistles to the Thessaloniciens, coll. The New International Greek Testament Commentary, Grand Rapids/Carlisle, Eerdmans/Paternoster, 1990, p. 172.

 

2. Jean CALVIN, Épîtres aux Thessaloniciens, à Timothée, Tite et Philémon, coll. Commentaires de Jean Calvin sur le Nouveau Testament, t. VII, Aix-en- Provence/Marne-la-Vallée, Kerygma/Farel, 1991, p. 41.

 

3. Henri BLOCHER, « La Pensée chrétienne et le mal (dernière partie) », Hokhma, n° 23, mai 1983, p. 73.

 

4. François BASSIN, Les Épîtres de Paul aux Thessaloniciens, coll. Commentaire Évangélique de la Bible, Vaux-sur-Seine, Édifac, 1991, p. 149.

 

5. Alfred KUEN, Le Christ revient, Quand ? Comment ? Pourquoi ?, Saint-Légier, Emmaüs, 1997, p. 32.