jogging

 

Parcours de sainteté

 

Par Reynald Kozycki

 

kozycki

Plusieurs parcs publics se sont dotés ces dernières décennies de beaux parcours de santé. Le chrétien, dans ses promenades bibliques, découvre des parcours de sainteté. Le livre par excellence dans l’Ancien Testament qui traite de ce thème est le Lévitique. Ce parcours nous conduit à suivre une voie étroite de laquelle l’impureté nous éloigne radicalement. Comment pouvons-nous appliquer les principes de « parcours de sainteté » du Lévitique à la lumière de la Nouvelle Alliance ?

 

 

 

Sens de la sainteté

 

L’appel à la sainteté est la notion clé du Lévitique : « Vous serez saints car je suis saint »2. Concernant Dieu, la sainteté est son essence même, sa nature parfaite, sa gloire infinie ainsi que sa perfection morale séparée complètement du mal. Il est radicalement différent de toutes les pseudo-divinités. Appliqué à l’être humain, la sanctification (ou « consécration ») passe par la purification de l’impureté, une séparation d’avec les idoles, le mal ou toute impureté3 et, en définitive, conduit à une relation avec le Dieu saint. « Ce que le Lévitique veut faire pénétrer dans la conscience des fidèles, et cela avec une inlassable insistance, c’est que la communion avec le Dieu vivant est la vérité dernière de l’homme »4.

 

 

L’impureté dans le Lévitique

 

L’impureté brise la communion d’avec Dieu. Pour simplifier, elle provient de plusieurs sources : une alimentation non conforme aux prescriptions divines, la lèpre, les « pertes séminales », l’accouchement, l’acte sexuel, les dérives sexuelles (inceste, homosexualité, adultère, bestialité…), le contact physique et spirituel avec les morts, l’idolâtrie…

 

L’état d’impureté peut durer pendant un temps plus ou moins long, et peut aller jusqu’à la malédiction et la mise à mort. Ces règles, notamment au niveau de la sexualité, devaient aussi garder le peuple d’Israël des pratiques abominables des nations qui l’environnaient. Par exemple les relations sexuelles avec un proche parent étaient interdites (18.5-20). A part les Babyloniens, qui, sur ce point, étaient plus ou moins en phase avec Israël selon le code d’Hammourabi5, les autres peuples en étaient très éloignés. On devine par les tablettes de Ras Shamra le degré de corruption sexuelle en particulier chez les Cananéens6.

 

L’impureté touchait à la vie courante du peuple d’Israël à travers, par exemple, l’acte sexuel dans le mariage, ou la période des règles pour la femme. Le fait même de toucher une personne impure directement ou indirectement rendait aussi impur. Une partie non négligeable de la vie du croyant était vécue dans « l’impureté ». L’attente d’une Nouvelle Alliance promise par les prophètes devait faire espérer une profonde transformation en l’être humain.

 

 

Les clés du Nouveau Testament

 

Sans les clés données par le Nouveau Testament, plusieurs de ces règles nous paraîtraient incompréhensibles, d’une autre époque. Certaines sont reprises explicitement dans le Nouveau Testament comme les dérives sexuelles (1 Co 6.9), l’idolâtrie (1 Jn 5.21), les formes d’occultisme (1 Co 10.20)

D’autres ont été accomplies ou terminées par la venue de Jésus. Son enseignement bouleverse la tradition religieuse juive en affirmant que le coeur humain est la véritable source de l’impureté :

Ne comprenez-vous pas que rien de ce qui, du dehors, entre dans l’être humain ne peut le souiller ? […]

Ainsi il purifiait tous les aliments. Et il disait : C’est ce qui sort de l’être humain qui le souille. Car c’est du dedans, du coeur des gens, que sortent les raisonnements mauvais : inconduites sexuelles, vols, meurtres, adultères… (Mc 7.18-23 NBS).

Jésus renverse la cacherout (le code alimentaire de l’Ancien Testament). Elle n’avait qu’une valeur provisoire pédagogique en attendant la Nouvelle Alliance. Pierre l’a compris après la vision d’une nappe avec les animaux impurs et une voix qui, à trois reprises, lui dise : « Ce que Dieu a déclaré pur, ne le regarde pas comme souillé » (Ac 10.15).

 

 

Le problème de fond, pour Jésus, se situe donc à l’intérieur de nous-mêmes. C’est le coeur avec ses mauvais raisonnements qui induit toutes les dérives qu’il nomme.

 

Paul reformule l’enjeu du problème en affirmant que la puissance du péché est intérieure. Il l’appelle la chair : « Le mouvement de la chair est révolte contre Dieu ; elle ne se soumet pas à la loi de Dieu ; elle ne le peut même pas » (Rm 8.7-8 TOB). En réalité, tout est atteint par le mal et l’impureté, dans une proportion telle que nous sommes considérés comme morts par nos fautes et nos péchés auxquels nous nous adonnions sous l’empire de ce monde (Ep 2.1-2). Quand le péché reprend vie en nous, l’état d’impureté revient, et la mort spirituelle recommence à poindre.

 

 

Purification et vie nouvelle

 

Jésus est le guide par excellence du parcours de sainteté. Il apporte d’abord la purification intérieure et la transformation promises par les prophètes : « Je vous purifierai de toutes vos souillures et de toutes vos idoles, je vous donnerai un coeur nouveau… je mettrai mon Esprit en vous » (Ez 36.26-27).

 

L’épître aux Hébreux démontre que Jésus nous ouvre le chemin du « saint des saints » et nous guide dans une communion vivante avec Dieu (10.19-21).

 

 

Être vigilant

 

La vigilance, néanmoins, reste de mise afin de ne pas s’écarter du parcours de sainteté. Si nous ne sommes plus « dans la chair » (Rm 7.5 ; 8.9), le péché n’est encore pas éradiqué en nous, il reste un principe actif redoutable prêt à revêtir la vie nouvelle par ses tentacules subtiles et parfois grossières (Ga 5.17-21) et à nous couper de la communion avec Dieu.

Ce qui entre peut parfois stimuler la convoitise ou la puissance de notre vie ancienne et nous replacer sur le terrain de l’impureté. Paul rappelle qu’il n’est pas possible de marcher dans la sainteté sans certaines séparations évidentes :

 

Car nous sommes le temple du Dieu vivant, comme Dieu l’a dit : J’habiterai et je marcherai au milieu d’eux ; je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. C’est pourquoi : […] dit le Seigneur ; Ne touchez pas à ce qui est impur, et je vous accueillerai. Ayant donc de telles promesses, bien-aimés, purifions-nous de toute souillure de la chair et de l’esprit, en achevant notre sanctification dans la crainte de Dieu (2 Co 6.14-7.2 NBS)

 

 

L’action de la Parole de Dieu

 

Comme le peuple de l’Ancienne Alliance devait suivre scrupuleusement les directives bibliques pour se garder de l’impureté, nous sommes appelés à garder la parole de Dieu. Elle a un pouvoir purificateur : « Déjà vous êtes purs grâce à la parole que je vous ai fait entendre » (Jn 15.3). Elle est « vivante et efficace » (Hé 4.12). L’écoute attentive affine le discernement de ce qui est bien et ce qui est mal, principale caractéristique de ceux qui ont atteint une certaine maturité en Hé 6.13-14.

 

 

Applications à propos des animaux purs et impurs

 

Comme le sportif veille à sa nourriture dans son parcours de santé, le chrétien est vigilant sur ses différentes « nourritures ». Lévitique 11 donnait à Israël les règles du jeu pour ne pas tomber dans l’impureté au travers des aliments impurs. En réinterprétant ce chapitre à la lumière du Nouveau Testament, nous pourrions en tirer quelques principes :

 

« Tout m’est permis, mais je ne me laisserai asservir par quoi que ce soit » (1 Co 6.12). Les excès peuvent devenir une occasion de chute. Pour Jésus le coeur s’alourdit par les excès de table, les ivresses et les inquiétudes de la vie (Lc 21.34). Comme le proverbe populaire l’affirme, il est possible de « creuser sa tombe avec ses dents ».

 

• Sur la base du bon sens, le chrétien devrait aussi être attentif à se nourrir de manière à peu près saine, en évitant par exemple trop de graisses, trop de sucres…

 

• Certains produits sont destructeurs, comme le tabac et ses 66.000 morts par an en France, l’abus d’alcool, les drogues… Paul rappelle que notre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en nous (1 Co 6.19-20), nous devons glorifier Dieu dans nos corps.

 

• On pourrait élargir à ce qui nous nourrit intérieurement. Nos lectures, ou tout ce que nous « ingurgitons » par nos écrans (images, infos, films…) peuvent être une occasion de chute. La parole de Dieu aide à repérer non seulement le temps gaspillé, mais aussi, les impuretés que nous laissons entrer en nous, réactivant parfois au quart de tour des passions charnelles. Une véritable désintoxication serait nécessaire dans certains cas afin de couper avec l’impureté et de reprendre le parcours de sainteté.

 

On ne plaisante pas avec l’impur. Ce qu’on sème, on le récolte (Ga 6.7). Rechercher la sainteté, sans laquelle nul ne verra le Seigneur (Hé 12.14).

 

 

Non au légalisme

 

On serait tenté de se lancer dans un parcours très légaliste qui finit par réactiver la vie ancienne : « Le péché, saisissant l’occasion, produisit en moi par le commandement toutes sortes de convoitises, car sans loi le péché est mort » (Rm 7.9). Le chemin de libération passe par le sacrifice unique de Jésus, par une redécouverte de la grâce de Dieu qui brise le règne du péché et de la mort (Rm 5.21- 6.14)7. Cela inclut l’obéissance de coeur à la Parole de Dieu et la vigilance.

 

Les règles du Lévitique, réinterprétées à la lumière du Nouveau Testament, nous pressent à fuir l’impur et à mener notre parcours de sainteté dans une relation vivante avec le Dieu saint.

 

R.K.

 

Questions de groupe

 

Préparation d’un groupe de discussions : Parcourir cet article avec les textes bibliques mentionnés

(on peut lire aussi l’introduction de la Bible d’étude du Semeur sur le Lévitique).

 

Question 1 : Comment définiriez-vous la sainteté de Dieu ? et la sainteté de l’être humain ?

 

Question 2 : Quels messages importants Jésus transmet-il concernant la pureté en Mc 7.18-23 ?

 

Question 3 : Comment Jésus nous purifiet- il ?

 

Question 4 : Quelles « nourritures » aujourd’hui pourraient nous rendre impurs à votre avis ?

 

Question 5 : Comment la Parole de Dieu peut-elle purifier ?

 

Question 6 : Qu’apprenons-nous sur le parcours de sainteté selon Ga 6.7 et Hé 12.14 ?

 

Question 7 : Comment éviter le piège du légalisme pour mener le bon combat ?

 


 

NOTES

 

1. Cette réflexion se base sur une prédication donnée en janvier 2012 par l’auteur sur Lévitique 11 à l’Église CAEF de Palaiseau.

 

2. Voir 11.44-45 ; 19.2 ; 20.7 ; 21.6-8 ; on retrouve le mot « saint » ou ses dérivés environ 86 fois.

 

3. Même si les différents dictionnaires ou encyclopédies bibliques ne sont pas nécessairement d’accord sur le sens du mot « saint », la définition donnée ci-dessus ressort en grande par tie des données bibliques. Pour une étude claire et pratique, voir James Packer, Les mots en questions, Éditons Grâce et vérité, 1981 ; R.K. Har rison, Introduction to the Old Testament, Eerdmans, 1988, p. 589- 613 ; John Harley, Word Biblical Commentary, Volume 4, Leviticus, Word Books Publisher, 1992 (notamment la partie ‘The message of Leviticus’)…

 

4. Bible d’étude TOB, note d’introduction au Lévitique.

 

5. Stèle babylonienne du 18e av. J-C Code d’Hammourabi 154ss (au Louvre) : « Si un homme a eu des relations avec sa fille, on le bannira de la ville. Si un homme a choisi une épouse pour son fils et que son fils ait eu des relations avec elle, mais que lui-même ait ensuite couché sur son sein et qu’on l’ait surpris, on le liera et on le jettera dans l’eau… ».

 

6. Selon R.K. Harrison, les Égyptiens ignoraient les règles de consanguinité, les Hittites acceptaient cer tains formes de sexualité avec les animaux, et les plus proches voisins d’Israël, les Cananéens, selon les tablettes de Ras Shamra, approuvaient : « La fornication, l’adultère, la bestialité et l’inceste », Introduction to the Old Testament, id., p. 610. On comprend mieux les mises en garde comme : « Vous ne ferez point ce qui se fait dans le pays d’Égypte où vous avez habité, et vous ne ferez point ce qui se fait dans le pays de Canaan où je vous mène : vous ne suivrez point leurs usages » (18.3).

 

7. Voir aussi Col 2.13-23