Obéissance et légalisme,

 

comment distinguer ?

 

L’épître aux Galates

 

 

Par Léonard Mutzner

Léo Mutzner

 

L’apôtre Paul est inquiet. Au lieu de commencer par des éloges à l’égard des destinataires de sa lettre ou avec une prière de reconnaissance, il entre tout de suite dans le vif du sujet en leur exprimant son étonnement de les voir se tourner vers un autre évangile (1.6). Cette préoccupation de Paul ressort tout au long de l’épître. Au début du troisième chapitre, il dit : Ô Galates insensés ! Qui vous a envoûtés ainsi ? Mais qu’est-ce qui préoccupe tant l’apôtre ? Un groupe de chrétiens judaïsants voulait que ces chrétiens de Galatie respectent un certain nombre de règles en plus de la foi en Jésus-Christ. Ils étaient « légalistes ». Le légalisme est mauvais. L’obéissance est bonne. Mais comment distinguer les deux ? Après une courte définition de ces deux termes, nous voulons voir à travers trois exemples où ils nous amènent.

pietonPar légalisme, nous entendons le moyen pour être justes et approuvés. Il faut produire quelque chose pour gagner l’approbation de Dieu. Dans cette dynamique, le légalisme met l’accent à l’extérieur, sur la performance, l’apparence et les résultats. À l’intérieur, le légalisme génère la crainte, l’insoumission à Dieu et, au fond, le rejet de la grâce de Dieu. L’apôtre Paul condamne sévèrement le légalisme. C’est un autre évangile.

Par obéissance, nous entendons l’expression de notre justification par la foi. Le terme grec traduit par « obéir » contient également le sens d’« écouter ». Ainsi l’obéissance s’enracine dans l’écoute du salut en Dieu. Elle nous fait découvrir la grâce de Dieu et nous confier en elle. Dans cette grâce de Dieu s’enracinent nos certitudes, notre reconnaissance et notre volonté d’obéir. Ainsi l’obéissance est fondée sur la grâce de Dieu.

 

Comment s’articulent le légalisme et l’obéissance par rapport au salut ?

Après avoir accepté l’Évangile de Jésus-Christ, les Galates sont tombés dans le piège du légalisme. Ils avaient peur que la simple foi ne soit pas suffisante pour être sauvé. Il fallait plus, et le point marquant de ce « plus » était la circoncision. Dans le légalisme il y a toujours des « plus » qui au fond sont des « moins ». Comme dit l’apôtre Paul Si vous vous faites circoncire, le Christ ne vous sera plus d’aucune utilité. Tout homme qui se fait circoncire est tenu d’accomplir la Loi tout entière ! ( 5.2-3 ) Le légalisme offense Dieu puisqu’ au fond il méprise l’oeuvre de Jésus-Christ.

 

L’obéissance consiste à affirmer que l’oeuvre de Jésus-Christ sur la croix est suffisante. Notre seule démarche consiste à avoir confiance en Jésus-Christ. Dans l’épître aux Galates, Paul fait un long développement sur sa propre vie, son cheminement et son ministère parmi les païens (1.11-2.10). Il connaît le légalisme par expérience. Mais Dieu l’en a délivré par la puissance de l’Évangile. Après son témoignage, il montre que l’Écriture enseigne l’obéissance de la foi et il cite l’exemple d’Abraham qui était déclaré juste par la foi seule (3.6-22). Si nous voulons être des fils d’Abraham et des fils de Dieu, la foi seule doit nous suffire.

Avons-nous bien compris sur quoi repose notre salut ? Avons-nous renoncé aux clichés du bon chrétien ?

Avons-nous renoncé aux tentations de la performance, de l’apparence et du formalisme ? La grâce de Dieu est-elle pour nous la source suffisante de joie, de paix et de certitude de salut ? Sommes-nous rassurés par l’amour souverain de Jésus- Christ sur la croix ?

 

Comment s’articulent le légalisme et l’obéissance par rapport à notre vie chrétienne ?

Les Galates emprisonnés dans l’approche légaliste sont obligés de puiser dans leurs propres ressources, « la chair », qui est ici synonyme de nos facultés humaines marquées malgré notre bonne volonté et nos bonnes intentions par la faiblesse et des limites. L’homme livré à lui-même produit une liste de vertus pas très vertueuse, comme le montre l’apôtre Paul dans Galates 5.19-21. Ce sont les fameux fruits de la chair. Dans une démarche légaliste, il faut les cacher par une forme extérieure de performance et d’apparence. Il faut constamment démontrer que nous ne sommes pas si mauvais ! C’est un effort qui coûte beaucoup d’énergie et de ressources ! Le légalisme offense Dieu puisqu’au fond il tente vainement de nous rendre justes par nous-mêmes.

 

L’obéissance, par contre, consiste à nous confier en Dieu, à nous ouvrir à son oeuvre, à laisser l’Esprit Saint travailler nos vies pour les transformer. L’Esprit Saint occupe une place importante dans l’épître aux Galates. Le terme revient 16 fois. Notre bon combat se situe au niveau de la confiance en Dieu, de notre « oui » à lui sans restriction et de notre désir de voir le salut de Dieu s’incarner dans nos vies. Dans un coeur ainsi disposé, l’Esprit de Dieu peut faire son oeuvre. La liste du fruit de l’Esprit Saint (5.22-23) montre la dynamique dans laquelle évolue le croyant. Il grandit et s’épanouit dans le salut de Dieu.

Sommes-nous dans une bonne dynamique d’obéissance dans notre vie chrétienne ? Nous ouvrons-nous à l’oeuvre de l’Esprit Saint dans nos vies ? Sommesnous animés par un désir d’authenticité, de sincérité et de profondeur ? Quels fruits voyons-nous apparaître dans nos vies ?

 

Comment s’articulent le légalisme et l’obéissance dans nos relations les uns avec les autres ?

liste-cocheLe légalisme nous fait vivre dans la crainte du regard des autres, nous pousse sans cesse à nous comparer aux autres et finalement nous conduit dans bien des tensions et des conflits. L’apôtre Paul reprend sévèrement une « colonne » de l’Église primitive, Pierre lui-même. Cela nous est raconté dans Galates 2.11-14. En effet, à Antioche, Pierre mangeait à table avec des chrétiens d’origine païenne. Mais quand Jacques arrive avec un groupe de chrétiens d’origine juive, il quitte discrètement la table et d’autres le suivent. Il le fait par crainte de la réaction de Jacques. Avec cette réaction, il offense les frères et soeurs d’origine païenne et l’apôtre Paul dit qu’il n’est pas en accord avec l’Évangile. Cet exemple montre que personne n’est à l’abri du piège de légalisme. Notre naturel est plus proche du légalisme que ce que nous voulons souvent admettre. Le légalisme offense Dieu puisqu’au fond il est centré sur nous-mêmes.

 

L’obéissance nous rend libres, et une preuve de cette liberté est notre amour du prochain (5.13-15). La liberté dans le sens biblique n’est pas l’autonomie, mais la capacité de rejeter le mal et de pratiquer le bien. Au chapitre 6, l’apôtre Paul montre à travers quatre exemples comment cela peut se traduire dans nos relations :

 

• Nous pouvons nous aider mutuellement à nous restaurer du péché (6.1). Le verbe employé vient de la médecine et s’applique à ce qui est démis et qu’il faut remettre.

• Nous sommes appelés à porter les fardeaux les uns des autres (6.2).

• L’apôtre nous invite à considérer les autres comme plus importants que nous-mêmes (6.3-5).

• Finalement, nous sommes encouragés à faire du bien (6.6-10).

 

Nos relations sont-elles marquées par le désir de servir les autres par amour ? Sommes-nous libérés de nous-mêmes pour aller à la rencontre de l’autre ?

L’apôtre Paul combat et condamne le légalisme avec une très grande fermeté. Il ne correspond pas à l’Évangile. Il cache une très mauvaise disposition, comme le résume si bien Henri BLOCHER1 :

Le légalisme est une tentative d’éviter la pleine autorité du Seigneur sur nous : nous essayons de faire notre petit jeu avec les commandements, que nous manipulons. Cela nous opprime, mais, en même temps, nous sommes les maîtres du jeu. Le légalisme est un effort pour échapper à la par faite souveraineté sur nous de ce Père qui nous donne l’être, et qui exprime la vérité de cet être dans sa loi pour nous.

 

L’obéissance va beaucoup plus loin que le légalisme. L’obéissance c’est nous confier entièrement à Dieu, c’est prendre appui sur ce que Dieu est, fait et dit et vivre en conséquence. Comme disait déjà jadis le prophète Ésaïe : Si vous n’avez pas la foi vous ne subsisterez pas (Es 7.9). La foi est une question existentielle pour le chrétien et cela dans tous les aspects de la vie. Les ressources du chrétien ne sont pas en lui-même, mais dans la grâce de Dieu manifestée par la présence et l’action du Saint-Esprit. Ces ressources sont accessibles à ceux qui croient.

 

Puisque l’Esprit est la source de notre vie, laissons-le aussi diriger notre conduite ! (5.25)

 

L.M.

 

 


 NOTES

 

1. www.eglisedutabernacle.fr/divers/foi-chretienne-et-legalisme/ Prédication du 12 octobre 2012