Vous avez dit hébreu, israélite, isréalien, juif 

 

 repas-juif

 

par Reynald Kozycki et Stephen Pacht 

 

 

Le Talmud est un vaste ensemble de commentaires visant à faire connaître la loi mosaïque et la complétant (écrits du 3e s. av. J.-C. au 5* s. ap. J.-C.). Les écoles rabbiniques s’y réfèrent. Il est composé de la Mishna : une classification, une sorte de mise au point des divers articles de la loi morale (2e s. ap. J.-C.), et de la Gemârâ, commentaire résumé d’une partie des articles de la Mishna. Il existe deux grandes familles de Talmud : Le Talmud de Jérusalem rédigé en Palestine au 3e s. et le Talmud de Babylone (des 4e et 5e siècles).

 

La Kabbale est une interprétation juive ésotérique et symbolique de la Bible (forme de panthéisme) dont le livre principal est le Zohar, Livre des Splendeurs (elle se prétend très ancienne, mais a été en réalité élaborée aux 2e et 1er s. av. J.-C).

 

Malheureusement les adeptes des sciences occultes utilisent dans un sens magique les signes de la Kabbale.

 

 

 

Le judaïsme, religion, culture ou sensibilité ?

 

Le mot « judaïsme » recouvre, de notre temps, des concepts très divers. Il désigne, avant tout, une religion – un système de croyances, de rites et de prescriptions morales fondé sur la Bible, sur le Talmud (voir encart), sur la littérature rabbi- nique, et souvent combiné avec la mystique ou la théosophie de la kabbale (voir second encart).

 

Les formes principales de cette religion n’ont pas beaucoup varié depuis près de deux millénaires et attestent d’un esprit pleinement conscient de soi, reflété dans une littérature religieuse et morale abondante.

 

Et il est pourtant susceptible d’évolution : le judaïsme peut n’être qu’une culture (même dans l’Etat d’Israël, des juifs s’en réclament sans foi ni pratiques religieuses). Et pour des millions de juifs exilés assimilés à la civilisation ambiante, le judaïsme ne peut même plus se dire culture : il est une sensibilité diffuse faite de quelques idées et souvenirs, de quelques coutumes et émotions, d’une solidarité avec les juifs persécutés en tant que juifs1.

 

 

Ne mélangeons pas les termes !

 

Le terme hébraïque Yehoudi désignait les descendants de la tribu de Juda, ainsi que, par la suite, les habitants du pays de Juda (Judée). loudaios en est la forme grecque et Judaeus la forme latine, d’où dérive notre mot français « juif2». Dans le Nouveau Testament, loudaios est utilisé tantôt pour parler des descendants de Jacob (Ac 2.5,11), mais plus souvent dans l’Evangile de Jean ou même dans les Epîtres, pour désigner les habitants de la Judée, et plus particulièrement les chefs religieux (Jn 7.13,1 Th 2.14).

Des commentaires chrétiens d’antan ont souvent attisé des attitudes anti-juives en ne faisant pas la distinction entre le peuple (juif) et les chefs religieux (judéens), les deux mots juifs et judéens traduisant le même mot grec loudaios.

  • Hébreux (de Hapirou ou Habirou : les « errants », les « nomades », peut-être une classe inférieure du peuple Hittite), terme utilisé en Egypte du 16e au 12e s. av. J.-C. pour nommer des peuplades opérant des razzias en Palestine et nomadisant jusqu’en Egypte. Dans la Bible, il désigne le peuple issu d’Abraham. L’adjectif s’utilise encore aujourd’hui dans l’expression Etat hébreu, pour Etat d’Israël.

  • Juif : dans le Nouveau Testament, il est synonyme de hébreu et de Israélite. Aujourd’hui le mot a repris son sens religieux (perdant son sens de ressortissant d’une nation et donc sa majuscule !) : le juif est un pratiquant de la religion judaïque. Bien que l’expression « confession Israélite » soit encore officielle en France, plus de 90% des juifs français se disent actuellement « juifs » plutôt qu’ « israélites ».

  • Israélite : dans la Bible, membre du peuple d’Israël. Utilisé surtout de 1800 à 1950 dans le sens d’adepte du judaïsme ; dans le langage profane, le mot est tombé en désuétude, car il prête à confusion avec le terme moderne Israélien.

  • Un Israélien est un citoyen de l’actuelle nation d’Israël. Le terme n’a en principe pas de connotation religieuse.

 

 

R.K. et S.P


 

NOTES

 

1. Emmanuel Lévinas, Encyclopédie Universalis, article Judaïsme. Parmi les sources qui ont contribué à la rédaction de cet article, mentionnons le Quid 2002 ; l’Encyclopédie des religions (Bayard Editions, 1997) ; «La religion, un enjeu pour les sociétés», Sciences Humaines, juin-juillet-août 2003.

 

2. Le développement et l’usage du terme « juif » pour désigner l’ensemble des descendants de Jacob, vient de ce que la plupart des Hébreux qui revinrent d’exil étaient descendants de Juda et s’établirent sur le territoire de l’ancien royaume de Juda.