Paul, un exemple de sanctification1

 

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par le Dr Paul Darling

 

 

Après un exposé doctrinal de la sanctification à laquelle nous appelle le Seigneur Jésus-Christ – une véritable « vocation » – l’auteur recherche dans la vie de l’apôtre Paul, l’illustration concrète du processus de sanctification.

 

 

Lorsque nous cherchons à présenter des exemples personnels de sanctification, nous rencontrons des difficultés considérables ! En effet, c’est le Saint-Esprit qui accomplit le travail de sanctification. Or le Saint-Esprit travaille de façon cachée, interne, dans le coeur de l’homme, et le comportement extérieur de l’individu n’indique pas de façon infaillible l’état réel de ce coeur. Autrement dit, le caractère de la personne et sa réputation ne sont pas toujours identiques. Même un journal personnel – si honnêtement tenu soit-il – ne présente qu’un portrait partiel, donc imparfait, de l’homme ou de la femme qui le rédige. Quant aux biographies religieuses réalisées par une tierce personne, celles-ci sont souvent plus élogieuses que véridiques.

 

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Nous pouvons beaucoup apprendre de l’histoire des grands serviteurs de Dieu de tous les temps de l’Eglise. Mais plus enrichissante encore est l’étude des biographies que nous présentent les Saintes Ecritures – et elles sont nombreuses ! Si nous choisissons celle de Paul, c’est en grande partie à cause de la personnalité de ce serviteur de Dieu : ce fut un homme au caractère entier, impulsif et courageux. De plus, la Bible nous livre beaucoup de détails sur sa vie intime et sur ses conflits spirituels, aussi bien que sur sa vie extérieure.

 

Ce qui nous impressionne tout d’abord, c’est sa vie d’activité débordante. Nous pensons à lui comme un missionnaire avant de penser à lui comme un saint ! Nous pensons à ses voyages, à ses discours, à sa séparation volontaire d’avec ses amis et sa vie antérieure : un véritable exil, pour vivre parmi des étrangers… Nous trouvons Paul en tant d’endroits différents, parmi des hommes exposés à la colère de Dieu – des hommes auxquels il fallait qu’il annonce à tout prix l’Evangile de Jésus-Christ.

 

Nous notons aussi que cette activité intense était accompagnée d’une vie de piété personnelle profonde, d’une croissance constante dans la grâce, d’une subjugation intense des passions mauvaises de son âme.

 

C’est à l’occasion du martyre d’Etienne que Paul nous est présenté pour la première fois. Luc, historien inspiré, souligne son activité, sa réputation parmi les Juifs, son statut éminent. Il était membre de la synagogue qui avait été incapable de tenir tête à la sagesse d’Etienne et l’avait traduit devant le Sanhédrin avec une accusation de blasphème. Il est probable que Paul avait eu une part active dans les discussions et dans la formulation des accusations. De plus, c’est aux pieds de Paul que les témoins avaient déposé leurs vêtements lors de la lapidation d’Etienne. Cet acte de persécution ne fut que la première indication du caractère passionné de Paul et de l’esprit qui l’animait. Elu au Sanhédrin – peut-être pour le récompenser – il poursuivit son action contre les chrétiens avec un zèle intense. Il « ravageait l’église… pénétrait dans les maisons… en arrachait les hommes et même les femmes » et « jetait les chrétiens en prison… respirant la menace et le meurtre contre les disciples du Seigneur… ».

 

Après avoir semé la confusion dans l’église, Paul – ou plutôt Saul, car tel était son nom à l’époque – cherche à donner plus largement expression à sa haine grandissante. Le voilà donc parti de Jérusalem (où les autorités romaines empêchaient la destruction systématique de leurs sujets) pour se rendre à Damas – ville sous le contrôle d’Aretas, prince d’Arabie. La « tolérance » relative des Romains ne risquait pas d’y modérer ou neutraliser sa passion contre les chrétiens! Quel exemple d’un coeur rempli d’orgueil, de haine et d’une volonté de destruction acharnée !

 

Voilà l’homme qui devint apôtre après avoir été arrêté par la voix de Christ. Considérons-le maintenant après un laps de temps de 20 années. Ces 20 années, remplies d’une activité inlassable dans la propagation de l’Evangile, ne peuvent être racontées ici, mais nous le retrouvons dans une situation de grandes difficultés. Ces difficultés résultent de la tâche qu’il accomplit : une église née grâce à son ministère est en danger. Son propre apostolat est mis en question et même nié. Il est accusé de motivations égoïstes et mercenaires. Il est accusé de vanité, d’inconstance dans son enseignement, et d’une présence physique insignifiante.

 

Sa souffrance est aggravée par le fait que « ses enfants bien-aimés » croient à ces accusations, et que son influence auprès d’eux diminue. De plus, ceux qui restent fidèles à son enseignement sont écartelés, car plusieurs préfèrent le savoir qu’utilise Apollos pour renforcer ses prédications, au style simple de Paul. Paul donc est maintenant moins apprécié, moins écouté, moins aimé… Mais quel changement dans ses réactions ! Lisez les deux lettres qu’il écrit à l’église de Corinthe à cause de cette situation : vous n’y trouverez pas un seul mot d’ambition déçue, de jalousie, d’orgueil blessé.

 

La rude nature de Paul – fière, passionnée, a été transformée par l’Esprit de Dieu – c’est cela la sanctification ! N’avait-il pas l’ambition d’être un « leader » à Corinthe, de s’y « faire un nom » ? Ne ressent-il pas maintenant le chagrin naturel d’un homme qui sait que son influence personnelle diminue ? Non ! Il a su noyer son individualisme dans la cause qu’il sert, dans son ministère. Il peut donc écrire sans arrière-pensée : « Qui donc est Paul et qui est Apollos ? Ils ne sont que les serviteurs par qui vous avez cru… ce n’est pas celui qui plante qui est quelque chose, ni celui qui arrose… »

 

Le fait que l’affection de ses «  convertis » commence à être transférée à Apollos ne trouble pas son calme ; écoutez son langage affectueux lorsqu’il parle d’Apollos : « Touchant notre frère Apollos, j’ai désiré qu’il vienne, avec les frères. »

 

Accusé par ses frères d’être bigot, d’être avare, d’être moralement poltron, de ne pas avoir de « présence », d’être faible et méprisable dans son langage, quelle est sa réaction ? Est-il offensé ? Est-ce qu’il se réfugie dignement dans le silence ? Ou encore, doué pour la parole malgré les critiques, se met-il à invectiver ses détracteurs et à les condamner avec passion ? Nullement ! Bien au contraire, son amour pour les Corinthiens le conduit à écrire : « .. Pour la troisième fois je suis prêt à venir, et ce sera avec joie… même si plus je vous aime, moins je suis aimé ! »

 

II est vrai que par devoir, il s’exprime vigoureusement contre certaines de leurs pratiques – mais dans quel esprit le fait-il ? Autant la punition des hérétiques semble avoir été pour Saul un délice, autant de simples reproches sont pour Paul « une oeuvre étrange ». La grâce de Dieu a opéré – l’esprit de Paul a été changé – il y a eu oeuvre de sanctification.

 

Mais regardons de nouveau l’apôtre, en laissant passer cette fois environ 10 années – 10 années de labeur, de voyages, de sacrifices, de fatigue, de déceptions, mais de joies aussi. Paul est maintenant prisonnier à Rome – un deuxième emprisonnement, plus rigoureux que le premier. Cette fois il est enchaîné à un soldat, il est traité comme un malfaiteur. Le privilège d’annoncer l’Evangile qui lui avait été accordé durant son premier emprisonnement lui est refusé. Les visites sont rares, et à l’occasion de son procès aucun chrétien n’ose l’encourager par sa présence. Il est seul devant la mort ! Et il sait que cela ne tardera pas, un matin bientôt ce sera l’exécution capitale. Quels sont alors ses sentiments ?

 

Il pourrait se plaindre de sa vie difficile – de l’injustice d’une mort violente après une vie de service totalement offerte à Jésus-Christ – se plaindre de sa solitude, de ses privations, de ses souffrances, de ses déceptions. Mais écoutez-le : « C’est pour cet Evangile que j’ai été établi prédicateur et apôtre… et c’est à cause de cela que je souffre… mais je sais en qui j’ai cru et je suis persuadé qu’il a la puissance de garder mon dépôt… Le Seigneur qui m’a assisté et qui m’a fortifié, me délivrera de toute oeuvre mauvaise, et il me sauvera pour me faire entrer dans son royaume céleste… à lui soit la gloire ! »

 

Paul, fortifié, délivré et sauvé par Dieu, a pu mener une vie sanctifiée, équilibrée, victorieuse – autant intérieurement qu’extérieurement.

 

Dr H.D.

 

(à suivre)


NOTE

 

1. Article publié en Ecosse en 1862, traduit et adapté par Esther Buckenham.