La Bible un livre pour aujourd’hui

 

 

Par Alain Nisus

Nisus

 

 

Nous voulons voir la place que l’Écriture occupe ou devrait occuper dans notre théologie, dans notre piété, dans notre éthique, plus largement dans notre vie de tous les jours. Qu’est-ce qui fonde son autorité ?

 

 

 

 

1. La doctrine de l’Écriture et l’identité évangélique

 

La doctrine de l’Écriture fait partie des fondamentaux de la foi évangélique. Mais, la foi évangélique n’est pas bibliolâtre, elle est d’abord trinitaire et christocentrique.

Cependant il est vrai que l’attitude que le mouvement évangélique adopte à l’égard de l’Écriture façonne son identité. On est ou on n’est pas évangélique en fonction de sa théologie de l’Écriture, en fonction du statut que l’on accorde à la Bible et de l’attitude que l’on adopte vis-à-vis d’elle, on se situe à l’intérieur ou à l’extérieur de la foi évangélique.

 

Les évangéliques d’aujourd’hui ont la théologie de l’Écriture qu’avaient les grands réformateurs, Calvin en particulier. Mais si les évangéliques sont des protestants orthodoxes, ils sont aussi les héritiers des différents mouvements de réveil qui ont marqué les Églises protestantes. Ces mouvements de réveil se caractérisent par l’insistance sur l’appropriation personnelle de la foi et par leur opposition à une intellectualisation de la foi. Ils se sont opposés à l’idée d’une foi purement formelle, être chrétien ce n’est pas seulement adhérer, être chrétien, c’est s’abandonner avec confiance en Dieu pour son salut et pour sa vie entière. Et pour pouvoir faire cela, il faut une véritable conversion à Dieu. Cela signifie que l’évangélique ne cherchera pas dans l’Écriture seulement un réservoir de doctrines ou des idées, mais ce sera un livre qui lui permet de rencontrer le Dieu vivant, qui veut rentrer en relation avec chacun de nous, qui nous a parlé et qui nous parle au travers des Écritures. Et lorsque nous lisons les Écritures, nous le faisons avec cette attitude du prophète disant : « Parle Seigneur, ton serviteur écoute ! »

Donc l’Écriture sera pour le chrétien évangélique un livre qui va le nourrir, qui va nourrir sa foi, sa piété. L’Écriture sera un guide qui nous aidera à nous orienter dans la vie, à prendre les grandes décisions.

 

 

2. L’importance de la Bible dans notre foi

 

Comment accède-t-on à la foi ?

Comment finalement devient-on chrétien ?

the-bibleC’est l’Esprit-Saint qui nous fait naître à la foi et pour ce faire, l’Esprit- Saint oeuvre ordinairement par la Parole, avec la Parole de Dieu. L’apôtre Paul nous dit : « Donc, la foi naît du message que l’on entend, et ce message c’est celui qui s’appuie sur la parole du Christ. » (Rm 10.17) C’est-à-dire que lorsque la Parole de Dieu est annoncée, lorsque l’Évangile est proclamé, est enseigné en vérité, alors l’Esprit-Saint agit, il produit une oeuvre dans notre coeur, il nous fait adhérer à la Parole annoncée, l’Esprit- Saint nous convainc que c’est vrai, et nous fait dire oui et amen. Il agit en nous, il nous donne la foi. Ainsi, si  sommes chrétiens, notre vie a été réorientée parce que nous avons entendu une Parole, la Parole de Dieu, la Parole de l’Évangile et l’Esprit- Saint nous a donné de croire que c’est la vérité, qu’on peut y adhérer, et construire sa vie dessus. Et cette Parole du Christ, c’est la vie.

Il est donc nécessaire de retourner à l’Écriture, tout ceci nous montre l’importance de la Bible pour notre vie de croyant, il nous faut une Parole qui fasse autorité.

 

 

3. Un Dieu qui se révèle par sa Parole

 

Nous avons déjà insisté sur l’importance d’une révélation de Dieu. De par sa nature même, Dieu est invisible, il est caché, il est insaisissable, il est inaccessible. Son intelligence est insondable. Ses pensées, ses chemins sont inscrutables. En outre, Dieu est une personne, et, parce que Dieu est une personne, il ne peut être connu que s’il se donne à connaître. La bonne nouvelle, c’est que Dieu s’est rendu accessible, il est rentré en relation avec nous. Et lorsque Dieu se révèle, Dieu le fait toujours dans le cadre d’une alliance. Il entre en relation, en alliance avec l’homme, il converse avec l’homme comme avec un ami, il parle la langue des hommes. Dieu, certes, s’est révélé dans la création, mais aussi dans notre conscience. Il a écrit sa loi dans nos consciences, dans nos coeurs, mais à cause du péché ces deux révélations de Dieu ne sont pas toujours clairement comprises, perçues, ou lues par les hommes, d’où la nécessité que Dieu commente sa révélation, d’où l’importance que Dieu explique, explicite la révélation générale de la nature, de la conscience.

 

Enfin, Dieu s’est surtout révélé dans la personne de Jésus de Nazareth, Après avoir autrefois à plusieurs reprises et de plusieurs manières, parlé à nos pères par les prophètes, Dieu nous a parlé par le Fils. (Hé 1.1-2) Dieu nous a parlé et sa Parole a été « inscripturée », sa Parole a été mise par écrit. Et c’est pourquoi Jésus, notre Seigneur lui-même, et ses apôtres à sa suite pouvaient dire : Il est écrit.

Quel rôle joue le fait que la Parole de Dieu soit mise par écrit ?

Dieu a pris le temps, il a voulu que sa Parole soit mise sous forme écrite, ce qui permet de souligner la permanence de la Parole. On dit souvent : « Les paroles s’envolent, les écrits restent. » La mise par écrit est donc le moyen que Dieu a choisi pour que sa Parole soit conservée. Et c’est pourquoi, déjà dans la Bible, on voit que Dieu ordonne de mettre par écrit certaines choses . Dans le Pentateuque, on trouve : Que cela soit écrit, que cela soit gravé, ainsi le texte d’Ésaïe 30.8 dit : Va maintenant, écris ces choses devant eux sur une tablette, grave-les dans un livre afin qu’elles subsistent dans les temps à venir, éternellement et à perpétuité

 

La mise par écrit permet aussi d’affirmer le caractère d’autorité juridique de la Parole de Dieu. C’est la Parole qui fait autorité. On peut dire comme Jésus et les apôtres : « Il est écrit…, c’est écrit… », et on peut donc recourir à cette autorité juridique qu’est la Parole de Dieu pour trancher certains litiges ou résoudre certains problèmes. On peut le faire justement parce que la Parole a été inscripturée.

 

La mise par écrit de la Parole nous invite aussi à l’étude. Nous pouvons lire, relire, méditer, ruminer, y revenir, l’étudier précisément.

 

 

4. Pourquoi la Bible plutôt qu’un autre livre ?

 

Si la Bible est si importante pour nous chrétiens, c’est précisément à cause du lien qu’elle entretient avec Jésus-Christ. Tout ce que je sais de Jésus-Christ mon Seigneur, je le sais par la Bible. Vous sondez les Écritures, ce sont elles qui rendent témoignage de moi. (Jn 5.39) Jésus-Christ est l’attente de l’Ancien Testament, et si l’Ancien Testament rend témoignage de lui, à combien plus forte raison le Nouveau Testament. Les évangiles nous rapportent les paroles, les faits, les gestes de Jésus-Christ et les épîtres nous explicitent le sens de sa mission, ce que croire en Jésus veut dire concrètement. Ainsi, pour mieux connaître Jésus- Christ notre Seigneur, il faut non seulement passer du temps avec lui dans la prière, mais aussi lire l’Écriture qui rend témoignage de lui. Nous faisons confiance à l’Écriture parce que c’est elle qui nous permet de connaître Jésus-Christ, mais aussi parce que, lui le Seigneur, lui faisait confiance. Quand on lit les évangiles, on voit que Jésus tenait les Écritures en très haute estime. Jésus avait beaucoup de respect pour l’Ancien Testament, il le citait et le faisait avec respect. Quand il a annoncé à ses disciples qu’il devait monter vers Jérusalem pour y mourir, la raison qu’il a donnée, c’est qu’il fallait que l’Écriture s’accomplisse.

 

 

5. L’autorité de la Bible

 

Qu’est-ce que l’autorité ? C’est le droit légitime dont dispose une personne, un groupe de personnes ou un texte, de régir la vie d’une autre personne ou d’un groupe de personnes. L’exercice de l’autorité appelle en réponse l’obéissance. 

Si on dit que la Bible est la Parole de Dieu inscripturée, nous aurons une attitude de soumission à cette Parole, car l’autorité de l’Écriture est finalement l’autorité de Dieu. Toute autorité appartient à Dieu et Dieu a investi son autorité dans sa Parole.

Comment Dieu exerce-t-il son autorité au moyen de la Bible ?

 

L’autorité de la Bible est souveraine dans la mesure où aucune instance supérieure ne peut contester l’enseignement de l’Écriture, il n’y a rien au-dessus. Ce n’est pas la raison humaine qui va contester l’enseignement de l’Écriture, ce n’est pas la science. Donc l’autorité de la Bible est souveraine.

 

L’autorité de la Bible est exclusive, ce qui signifie qu’aucune autre autorité ni le magistère de l’Église, l’enseignement de l’Église, ni la science, ni les expériences les plus extraordinaires, ne peuvent rivaliser ou être combinés avec l’autorité de l’Écriture.

 

L’autorité de l’Écriture est extensive. Elle s’étend à tous les domaines, elle n’est pas limitée à la foi et à la morale.

 

 

6. Autorité de la Bible ou autorité de notre interprétation de la Bible

 

Il ne faut pas confondre l’autorité de la Bible et l’autorité de notre interprétation de la Bible. Il faut d’abord se mettre d’accord sur le statut de l’Écriture, ensuite sur ce qu’elle dit. Une des difficultés, c’est de comprendre la Bible, de trouver le véritable sens de la Parole. Il ne faut pas confondre l’autorité de la Bible sur ma vie, sur l’Église et l’autorité d’une interprétation particulière ou d’une école de pensée ou d’une école théologique particulière. C’est l’Écriture qui doit faire autorité et non pas notre interprétation de l’Écriture qu’il faut imposer. On voit combien la question est difficile, parce que pour que la Bible puisse exercer son autorité, il faut savoir ce qu’elle dit, il faut l’interpréter, or notre interprétation de l’Écriture n’est pas infaillible. On peut risquer une occasion de chute pour la foi de nombreuses personnes, si nous imposons une forme d’interprétation de la Bible comme norme de foi. Nous pouvons avoir des convictions, croire que telle interprétation de la Bible est plus convaincante que telle autre, croire que telle théologie fait mieux droit aux données de l’Écriture que telle autre, mais il faut faire attention à distinguer entre les données fondamentales, les vérités non négociables et la périphérie, des vérités sur lesquelles on peut ne pas être d’accord, que l’on peut souscrire à titre personnel, mais qu’on n’imposera pas comme vérité de foi aux autres. On peut décider d’enseigner telle ou telle chose, mais on le fera avec humilité, et aussi avec honnêteté, en signalant que tous les chrétiens qui prennent au sérieux l’Écriture, qui se soumettent à son autorité, ne sont pas unanimes sur ces questions.

 

 

Conclusion

 

James PACKER posait la question : « Qu’est-ce qu’un chrétien ? » Il répondait : « C’est quelqu’un qui reconnaît l’autorité de la Parole de Dieu et s’y soumet. »

 

Puissions-nous vraiment redécouvrir la Parole de Dieu, redécouvrir son autorité et nous soumettre en tant que disciples à l’autorité de Dieu et de sa Parole, pour nous, pour nos vies individuelles et pour nos Églises.

 


NOTES

 

1. Ce texte résume la première des quatre conférences d’Alain NISUS au Congrès National des CAEF, donnée le 23 avril 2011 à Sainte-Foylès- Lyon, il a été élaboré par François-Jean MARTIN, à partir des notes transmises par l’auteur et celles qu’il a prises. Le texte de la conférence a donc été transformé, certaines parties ont été enlevées et d’autres résumées, le style oral a été conservé.

 

2. Voir Ésaïe 8.19-20 et 30.8-11.