Temoignage

 

« Mais qu’est-ce que je vais bien pouvoir leur dire …? »

 dialogue1

par Sylvain et Sylvia Lombet

 

 

Sylvain LOMBET vient de terminer des études de psychologie, et de se marier avec Sylvia ! Ensemble ils ont réfléchi à la question suivante : Comment témoigner de Christ à ses amis, à ses copains ?

 

Vous êtes-vous déjà posé cette question lorsque vous avez eu l’occasion de partager votre foi ? Moi oui. De nombreuses fois même. Non pas parce que les occasions de parler de ma foi ont été nombreuses mais parce qu’au cours d’un même témoignage, il m’est arrivé de me poser plusieurs fois cette question !

 

Dans les lignes qui suivent, mon propos n’est pas de donner un « modèle » de témoignage, encore moins des recettes pour être un «bon» témoin. Simplement, je souhaiterais vous faire part de mes réflexions sur ce thème en l’illustrant d’un témoignage personnel.

 

 

Des obstacles à notre témoignage ?

 

Je crois profondément que le témoignage ne concerne pas seulement les mots. Nous n’avons pas toujours besoin de parler pour nous faire entendre. Les gens sont bien plus sensibles à notre façon d’être qu’à nos belles paroles. Je pense qu’une personne née de nouveau EST témoin. C’est un état de fait. Reste à savoir de quoi ou de qui ?

 

Notre parole doit accompagner notre propre vécu. Prenons l’exemple d’un camp d’été : si les animateurs disent aux enfants de ne pas dire du mal des autres alors qu’eux-mêmes passent leur temps à se critiquer, quelle crédibilité et quelle autorité ont-ils ? Qui va les croire ? De même, si je parle de Dieu sans savoir qui il est, de son amour manifesté en Jésus-Christ sans le prendre pour moi, de sa grâce envers les hommes sans avoir expérimenté le pardon, qui va me croire ? Je parle dans le vide. J’ai un beau « discours évangélique », sans pour autant saisir le sens des mots que j’emploie : péché, grâce, rédemption, liberté… Ma vie ne reflète donc pas ce que je proclame. Si je veux avoir un témoignage pertinent, je ferais mieux de vivre ce que je dis.

 

Par ailleurs, la peur de l’autre m’a souvent rendu hésitant dans mon témoignage. Après la question « Qu’est-ce que je vais dire ? », nous nous demandons parfois : « Que va-t-il (elle) penser de moi ? » Nous avons peur d’être ridicule ou bien nous appréhendons les réactions de notre interlocuteur en imaginant qu’il nous attend au tournant, qu’il va nous poser des questions pièges auxquelles nous ne nous sentons pas capables de répondre, nous ne voulons surtout pas le choquer afin qu’il garde un bon souvenir de notre discussion, nous souhaitons qu’il soit d’accord avec nous, voire qu’il pense comme nous… et dans tout cela, nous cherchons à caser notre savoir hésitant sur des vérités que nous connaissons mal 

 

Mais d’où vient donc ce malaise ? Nous avons peur d’être jugés, de ne pas être à la hauteur… Mais à la hauteur de quoi ? ou de qui ? Dieu nous attendrait-il lui aussi au tournant si nous ne sommes de « bons » témoins ? Car nous savons bien qu’en tant que chrétiens nous avons à «évangéliser» le monde et que si nous ne témoignons pas, certains hommes et femmes seront perdus…

 

Nous voici donc tiraillés entre deux tendances : nous voulons témoigner mais cela nous effraie ; et nous voulons parler mais nous nous rendons compte à quel point c’est difficile.

 

 

Qui suis-je… ?

 

Comme je l’ai dit précédemment, je crois qu’il est impossible de parler à d’autres de ce que l’on n’a pas soi-même expérimenté. A mon sens, c’est à ce niveau que se trouve le malaise : sommes-nous au clair avec notre propre identité de chrétien ? Les difficultés dans la rencontre avec l’autre viennent souvent des difficultés que nous rencontrons avec soi-même.

 

Pas besoin d’être psychologue pour comprendre qu’avant d’explorer le monde qui l’entoure, le jeune enfant a besoin de se sentir en sécurité. Cette sécurité se construit dans ses relations avec ses parents et lui permet de structurer son identité. Si son identité est bien construite (et cela demande du temps !), il pourra aller à la rencontre d’un autre, différent de lui, sans que cela soit terrifiant. L’autre ne sera pas source de peur mais plutôt de curiosité et d’enrichissement mutuel.

 

De même pour le témoignage : si ma foi est solide, je n’aurai pas trop peur de l’autre, mais si elle est floue, alors j’aurai peur d’en parler parce qu’au fond de moi je ne sais pas qui je suis.

 

C’était la réaction de Moïse lorsque Dieu l’a appelé depuis le buisson ardent (Ex 3.11) : Qui suis-je. moi. pour aller trouver le pharaon et pour faire sortir les Israélites d’Egypte ?

 

Moïse fait-il preuve d’humilité en posant cette question ? N’est-ce pas plutôt la question d’un homme perdu dans ses origines (égyptien ? hébreu ?) qui ne sait effectivement pas qui il est ?

 

 

Je suis avec toi…

 

Voilà la réponse de Dieu à cette question « qui suis-je ? » (verset 12). Moïse a avec lui celui qui est, l’Eternel. N’est-ce pas une invitation à la relation ?

 

L’identité ne se construit pas par magie, elle se crée dans la relation avec un autre. Et Dieu se propose comme partenaire de la relation : je suis avec toi. C’est comme s’il disait : « Tu veux savoir qui tu es ? Alors faisons route ensemble, apprenons à nous connaître. »

 

Pour construire mon identité de chrétien, j’ai besoin d’être en contact avec Dieu. Il se révèle dans sa parole, la Bible, aussi ai-je besoin de prendre du temps pour l’écouter et lui parler. Cet échange régulier ainsi que l’application dans ma vie quotidienne de ce que j’en comprends, vont me fortifier de plus en plus et m’aider à parler avec vérité.

 

 

Témoignage d’un étudiant

 

Nous étions quatre à manger au restaurant universitaire lorsque l’étudiante qui était en face de moi se mit à parler de réincarnation. Quelques secondes plus tard, elle m’interpella : « Qu’est-ce que tu penses, toi, de la réincarnation ? »

 

Intérieurement, je réagissais de deux façons différentes : d’une part, je me disais : « Super ! Ça fait longtemps que je n’ai pas parlé de Dieu, c’est l’occasion » ; d’autre part, on me demandait de prendre position sur ce sujet… que répondre ? Réalisant que la question posée n’était pas un test ou un examen, j’ai alors pu répondre avec confiance : « Je suis contre », ce qui a surpris mon interlocutrice. Ce n’était pas tant mon opinion qui l’avait surprise que la conviction de ma réponse.

 

Sur le même ton, j’ai expliqué pourquoi je me positionnais ainsi : en tant que chrétien, mon point de repère par rapport à cette question, c’est la Bible, et la Bible dit qu’il est réservé à l’homme de mourir une seule fois après quoi il est jugé par Dieu (Hb 9.27). Cela ne laisse donc pas de place à une éventuelle réincarnation : quand je meurs, mon corps est enterré et se décompose mais mon âme rencontre Dieu.

 

Cet échange a bien sûr intéressé les deux autres étudiants qui m’ont demandé un peu plus tard ce que signifiait être chrétien, puis quelle était la différence entre catholiques et protestants. J’ai donné quelques éléments de réponse, le rôle de la vierge Marie et de l’Eglise par exemple, sans toutefois entrer dans le détail car je sentais qu’au travers de toutes ces questions ils s’interrogeaient sur « la pratique religieuse ». Et moi, je voulais les emmener sur un autre terrain que celui de la religion : celui de la relation personnelle avec Dieu.

 

J’ai de nouveau parlé de la Bible, des liens que l’on peut y trouver entre l’histoire du peuple hébreu et notre propre histoire, de l’intérêt de Dieu pour l’être humain puisqu’il est venu en personne parmi nous, etc. A la fin, je les ai invités par deux fois à lire ce livre, la Bible, mais je crois que la deuxième fois était de trop : ils m’ont répondu en coeur un « Amen ! », comme après un sermon, qui m’a fait comprendre qu’il ne fallait pas trop insister.

 

Voici donc une situation où l’on m’a demandé de me positionner sur un thème actuel. Dans cet échange j’ai tenté de me placer comme partenaire et non comme quelqu’un qui répondrait à un questionnaire. Quand je ne savais pas quelque chose, je n’hésitais pas à le dire. Nous, les chrétiens, nous pensons souvent que nous savons des choses que les non croyants ne savent pas. C’est en partie vrai, mais je crois que le témoignage tient plus de l’échange que de la transmission d’un savoir à des « non initiés ». Dans cet exemple, je regrette de ne pas leur avoir davantage demandé de se positionner sur les questions qu’ils m’adressaient.

 

 

Pour conclure,

 

Je résumerai quelques points concernant le témoignage. Il me semble important de :

 

  • Partir de ce que l’autre a à dire, surtout s’il entame la conversation.

  • Ne pas hésiter à poser des questions. Le témoignage n’est ni un monologue, ni un questionnaire auquel le chrétien est soumis. C’est un échange.

  • Eviter le « charabia évangélique », parler avec des mots simples. Cela demande d’une part, d’avoir pris un minimum de recul par rapport aux mots traditionnellement employés, et d’autre part, d’appliquer à nos vies ce que nous incitons d’autres à faire.

  • Arrêter de croire à la parole « magique » qui convertirait l’autre en un clin d’oeil. Ce qu’on dit ne fait pas tout.

  • Enfin, ne pas oublier que nous ne sommes pas seuls (Mt 28.20). Nous souvenir que Dieu est à nos côtés et qu’il nous aidera à parler avec assurance.