L’autorité dans l’Eglise locale1 (1° partie)

 

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par Jacques DUBOIS2

 

 

Introduction

 

 

En langue française, il n’y a guère d’ouvrages qui traitent de la question. Le thème de l’autorité est pourtant important : il détermine nos actions et nos réactions, nos acceptations ou nos oppositions.

 

Nous avons le désir de pouvoir mieux assumer nos responsabilités pour le bien de l’Eglise locale… ou pour notre propre prestige. Or dans l’Eglise le prestige doit être une valeur totalement étrangère, dès lors que le Seigneur a dit: Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous, et le serviteur de tous (Mc 9.35).

Version complète en 3 parties
 

 

 

 

 

 

Mais surtout, il en va de la gloire du Seigneur. L’Eglise lui appartient. Les Eglises locales en sont l’expression concrète, visible. Il veut les voir prospérer et être saintes pour son prochain retour.

 

Or, là où la question de l’autorité n’est pas réglée, l’Eglise locale est comme atteinte d’un mal qui menace son témoignage, détruit la confiance, handicape sa foi, perturbe l’amour. Elle est alors menacée dans son harmonie au dedans et dans sa crédibilité au dehors.

 

Qu’est-ce que l’autorité ? Le pouvoir de décider, de commander, d’imposer sa volonté à autrui.

 

L’ensemble des qualités qui imposent pour se faire respecter, écouter, obéir (Larousse). Elle ne devrait pas avoir besoin d’avoir recours à la contrainte physique car la véritable autorité est une puissance supérieure qui s’impose à nous en vertu de son caractère. Devant cette autorité nous nous inclinons librement.

 

 

 

LE FONDEMENT ET LES SOURCES DE L’AUTORITE

 

1. UNE AUTORITE FONDEE

 

Beaucoup de textes seraient à citer. Retenons la confession de Job, après que Dieu se soit révélé à lui: « Je reconnais que tu peux tout, et que rien ne s’oppose à tes pensées » (Job 42.2).

 

Par « autorité » nous entendons surtout le mot exousia. Il signifie le pouvoir légitime, réel et libre d’agir, de posséder, de contrôler, d’user et de disposer de quelque chose ou de quelqu’un. Le mot dunamis lui est associé. Il exprime la puissance. Toute exousia implique la dunamis, qu’il s’agisse de Dieu, des autorités célestes bonnes ou mauvaises, des autorités terrestres.

 

Dieu est le fondement et la source première, unique de toute autorité

 

En Genèse 2.4, nous apprenons un premier nom de Dieu : YHWH, Je suis !

 

Voilà la source première, fondamentale et unique de l’autorité. Il n’y a rien au-delà, ni dans le temps, ni dans l’espace, ni dans l’éternité. En ELOHIM-YHWH sont fondés et subsistent éternellement tous les attributs de la nature de Dieu. Ils constituent son autorité suprême (Rm 1.20).

 

L’autorité de Dieu est l’expression de sa souveraineté divine et éternelle. En disant « Dieu », nous entendons bien le premier mot par lequel il se présente dans Gn 1.1 : Elohim (un pluriel). D’emblée Dieu révèle sa trinité. Il est Père, Fils et Saint-Esprit.

 

Dieu est d’abord Père

 

Curieusement Dieu ne semble pas pressé de nous dire son nom de « Père ». Il nous faut aller jusqu’à Gn 32.6 pour lire : N’est-il pas ton Père, ton Créateur?

 

Il faudra surtout attendre la venue de Jésus-Christ, le Fils unique et bien-aimé, pour que soit révélée une compréhension plus profonde de la personne de son Père, devenu notre Père ! Révélation ineffable. Mais revenons à la Genèse.

 

Le Fils occupe la place centrale

 

II est Dieu. Il est Seigneur dans le sens absolu et divin du terme. Il a autorité comme le Père, de toute éternité. Il ne l’a pas acquise à la suite de l’incarnation, mais la possède de droit divin. Il l’a puissamment manifestée à la création. La Parole a été faite chair (Jn 1.14). Donc la Parole existait avant l’incarnation. Quand nous lisons : Dieu dit… c’est lui, le Fils qui opère ,  car en lui tout a été créé dans les deux et sur la terre, ce qui est visible et ce qui est invisible, trônes, dignités, dominations, autorités (Col 1.16-17).

 

Il règne sur la vie et sur la mort. Il a tout pouvoir dans les cieux et sur la terre. Bien qu’il ne fasse rien sans l’ordre du Père, tout ce que le Père fait, le Fils le fait pareillement (Jn 5.1). Il ressuscite les morts, comme le Père, il a reçu le pouvoir de juger, il doit être honoré comme le Père… (Jn 5.21-23).

 

Le Saint-Esprit occupe une place essentielle

 

Prenons garde au phénomène du balancier. Les excès et les dérapages actuels ne doivent pas nous pousser à la réaction inverse de minimiser la place de l’Esprit Saint. Nous ne l’identifions pas à tout ce qui se dit aujourd’hui et prétend se faire en son nom. Nous nous souvenons de l’avertissement de Jésus en Mt 7.21-23. L’abondance des prophéties et des miracles au nom de Jésus n’authentifie pas pour autant les acteurs.

 

Certes Jésus est notre premier paraclet (1 Jn 2.1). Mais il annonce à ses disciples la venue d’un « autre » paraclet3 dans le temps de son absence (Jn 14.16-18).

 

De la première à la dernière page de la Bible, le Saint-Esprit est présent, de la création (Gn 1.2) à la fin des temps (Ap 22.17,20).

 

En ce Dieu trinitaire, les 3 sources sont concomitantes. Elles forment dans l’unité essentielle, le fondement de l’autorité divine, souveraine, éternelle. Dans l’unité, sans confusion.

 

Mais voilà qu’il reste encore une source d’autorité divine, une source seconde, mais qui vient aussi d’En Haut, Parole de Dieu, transmise par ceux que Dieu lui-même a choisis :

 

La Bible, lieu privilégié d’une autorité divine, normative et fonctionnelle

 

Le Dieu souverain n’est pas, comme le prétendaient les gnostiques, le Silence, ni le Grand Abîme. Il parle pour se révéler aux hommes, et en même temps pour leur donner une révélation d’eux-mêmes. Car ils croient se connaître, mais ils se trompent, ou plutôt ils ont été trompés. L’autorité divine se trouve donc en un lieu accessible, qui ne varie pas, dans la Bible. Elle est l’authentique Parole de Dieu. Sans elle, nous n’aurions pas de repère fixe ni de référence sûre. En l’Ecriture et par elle, Dieu parle aux hommes. A tous les hommes. Pas seulement aux chrétiens.

 

Voilà donc les sources de l’autorité qui en sont le fondement immuable, Dieu et sa Parole :

 

  • La Révélation : Elle est à la fois « Loi et Evangile », « Parole et Ecriture ». Elle se déclare elle-même inspirée de Dieu et utile pour enseigner dans la justice… (2 Tm 3.16). Elle est différenciée des paroles humaines, bien qu’étant parvenue par des hommes choisis par Dieu. Elle agit (2 Th 2.13).

 

  • L’incarnation : Le temps où le Christ est venu sur notre terre, Parole faite chair, Dieu parmi nous. Il a toute autorité. Rien ni personne ne lui résiste (Mt 28.18).

 

  • L’illumination : « L’Esprit-Vie » a inspiré la Bible. Il se tient au service du Christ. Il nous fait naître de nouveau, nous conduit, nous éclaire, nous équipe, nous prépare pour le grand rendez-vous. Il participe en nous à l’autorité que nous avons en Dieu le Père et le Fils.

 

Quelques mises en garde utiles

 

  • Concernant l’Esprit : Nous ne devons pas le mettre au premier plan, au point qu’il éclipse le Père et le Fils. Sinon nous sombrerions dans l’illuminisme ou le mysticisme. Nous ne devons pas davantage lui donner une priorité telle, qu’il finisse par occulter la place qui revient à la révélation scripturaire (Ap 22.18-19).

 

  • Concernant le Christ : Nous ne devons pas lui substituer une idole à la mesure de l’homme: un Christ social, moral, exemplaire, révolutionnaire, panthéiste, cosmique, etc. Dans une assemblée de chrétiens réunis le jour de Noël 1931, Gandhi expliquait: « C’est le Sermon sur la Montagne qui m’a fait aimer Jésus. J’ose dire que je n’ai jamais été intéressé par le Jésus historique. Peu m’importe si quelqu’un a prouvé que l’homme nommé Jésus n’a jamais existé, et si ce qui est raconté dans les évangiles est une invention de l’imagination de ceux qui les ont écrits4 » Non, Christ s’est inscrit dans l’histoire de l’humanité, éternel Fils du Dieu créateur; il est réellement mort et ressuscité. L’apôtre Paul donne un avertissement précis aux Corinthiens à ce sujet (1 Co 15.14).

 

  • Concernant les Ecritures : Nous devons reconnaître le Christ au cœur de celles-ci. Il est à la fois celui qui révèle et qui est révélé. Les Ecritures n’ont de sens que par lui et en lui. Elles sont entièrement tournées vers le Christ en vue de notre salut. Faute de quoi, il ne nous reste qu’une orthodoxie morte (Jn 5.39 40).

 

En conclusion, L’autorité exercée par Dieu nous oblige à une écoute fidèle et soumise, produisant une action spontanée et persévérante. N’intervertissons pas l’ordre. D’abord l’écoute, ensuite l’action. Pour ceux qui seraient tentés de chercher ailleurs, il suffit de rappeler la parole : Tu n’auras pas d’autres dieux devant ma face (Ex 20.3). Et il n’y aura pas d’autre évangile que celui déjà annoncé (Ga 1.9).

 

 

2. UNE AUTORITE CONTESTEE

 

Aujourd’hui les hommes ont rejeté l’enseignement biblique (2 Tm 4.3-5). Nous vivons dans un monde que l’on dit être « post-chrétien ». Nous préférons parler des « temps d’apostasie » en utilisant l’expression de 2 Th 2.3. Les mots changent. La réalité reste la même. Dans une analyse un peu plus affinée, on dit aussi « postmodernité » parce qu’on a le sentiment que la modernité a implosé. Les choses ont vraiment commencé à changer après la seconde guerre mondiale.

 

Aujourd’hui le refus de l’autorité conduit au chaos (l’actualité le démontre). Nos Eglises sont souvent bien perméables à l’influence du monde ambiant. Il n’est donc pas inutile de dresser un bref bilan.

 

La contestation de l’autorité

 

Elle se manifeste en ce que toute forme de soumission est de plus en plus écartée. Chacun veut pouvoir faire comme bon lui semble (Jg 17.6). L’expression biblique : …rebelles à leurs parents (2 Tm 3.2) décrit un état d’esprit qui se généralise. Les parents étaient le symbole type de l’autorité. Aujourd’hui, cette autorité est si souvent absente, inexistante. Les bandes qui hantent les quartiers difficiles sont souvent, au départ, des jeunes qui cherchent ce qu’ils n’ont jamais connu, de vrais parents.

 

La Bible, une cible de choix.

 

Quand on se révolte contre une autorité, il faut frapper dans une cible accessible. Dieu serait la première cible, mais il est totalement hors d’atteinte des hommes, ils ne peuvent que lui jeter des blasphèmes (Ap 16-8-11), signes de leur révolte et de leur impuissance (ps 2). Reste alors la Bible, Parole de Dieu. Elle a été donnée aux hommes comme moyen de révélation divine. Elle est entre leurs mains. La voilà donc la cible accessible aux humains, suspectée d’inauthenticité dès l’origine (Gn 3.1) : Dieu a-t-il réellement dit ?

 

  • Le relativisme, tel un raz de marée, déferle sur notre monde. Les médias, de l’occident qui fut naguère christianisé, n’observent plus aucune retenue. Et cela touche le domaine religieux, théologique et même pastoral.

 

Il n’y a pas, il n’y a plus de vérité absolue. Seulement des vérités pour chaque public, chaque lieu, mais avec la prétendue volonté de se rejoindre tous au sommet de la montagne. Depuis longtemps, le texte biblique a été découpé en petits fragments de traditions locales. Qu’en reste-t-il ? Une émotion, une intuition, de la poésie, peut-être une religion. Plus personne n’a le droit de prononcer un jugement, encore moins d’exercer une discipline. L’autorité qui se réclamerait de la Bible pour établir des frontières n’est plus supportable. Mais ce ne sont plus seulement les milieux considérés traditionnellement comme « libéraux » ou « œcuméniques » qui pratiquent une relecture des récits bibliques.

 

  • Le pluralisme est absolutisme, conséquence logique de ce qui précède. Il n’est désormais plus acceptable qu’une religion soit vraie et les autres fausses. Tous les systèmes sont valables. Tous les credo sont vrais. La tolérance est reine, vérité et fausseté ne s’excluent plus, elles sont complémentaires. C’est le triomphe de l’incohérence. Ces chemins du relativisme et du pluralisme conduisent au scepticisme. Et il suffit d’un pas pour arriver au cynisme. Pilate n’en était pas loin en interrogeant Jésus (Jn 18.38).

 

  • Les hiérarchies sont dévaluées. Sur le plan des valeurs artistiques ou morales, il n’est plus possible d’établir des évaluations. Tout est affaire de goût personnel. C’est le plus court chemin vers la médiocrité, et parfo la vulgarité. Nous le constatons tous les jours par les médias.

 

  • L’individualisme se referme alors comme un piège : MOI, pourquoi ne serais-je pas le centre de mon univers ? Les autres i m’importent vraiment quand ils me servent. Je déclare qu’ils n’existent que par rapport à moi. C’est l’émergence de l’égotisme, exaspération de l’égoi’sme, poursuite exclusive du moi. On parle de nombrilisme et de narcissisme. Parvenu à ce stade, l’individu n’a plus beaucoup de devoirs. Seulement des droits !

 

 

3. LE RETOUR VERS LE CHAOS

 

C’est la conséquence du rejet de l’autorité. Les vertus et le bien public sont des mots que chacun interprète à sa manière et à son avantage. La démocratie décomposée prépare le chaos et conduit à la dictature. Il s’installe alors…

 

  • un courant de pessimisme : les discours, les promesses, les efforts ne changent jamais rien. La pauvreté et les injustices ne cessent de croître. Il en résulte…

 

  • une frénésie de consommation pour ceux qui peuvent se la payer. Il y a bien une clientèle de luxe, il y a surtout une cohorte pitoyable de pauvres, de démunis totalement dépendants.

 

  • un dédain pour l’intériorité, alors qu’on n’a jamais attaché autant d’importance au « bien-être personnel ». On célèbre ce qui se voit, la surface des choses. Les images passent avant les mots. Les stars du show-bizz sont les modèles. Les sensations priment sur la réflexion. Et tout cela amène le retour en force des spiritualités sans retour au vrai Dieu.

 

C’est dans ce monde-là que se trouve l’Eglise de Jésus-Christ. C’est ici et maintenant que sont nos Eglises locales. Et nous devons y travailler avec foi et amour, sagesse et persévérance. Pourquoi ? Parce que le Seigneur nous a mandatés. Et pour accomplir ce travail qui dépasse largement nos possibilités, il nous a donné une délégation de pouvoir.

 

 

4. UNE AUTORITE DELEGUEE

 

Une lecture de Gn 1 et 2 fait aussitôt comprendre la place exceptionnelle qu’occupe l’homme dès sa création.

 

En Eden

 

L’accent est mis sur la responsabilité et l’homme que l’homme reçoit de Dieu. Il doit gérer la création, en la cultivant au milieu d’un prodigieux jaillissement de vie, en la gardant face à un danger déjà menaçant, puis en classant les êtres créés en leur donnant à chacun un nom. Il peut largement jouir de cette nature, aller partout prendre du fruit de tous les arbres, sauf d’un seul. Il peut user mais pas abuser. Il doit construire et non détruire. Il est le gérant, pas le propriétaire. Il a une autorité mesurée et contrôlée par celui qui la lui a donnée. Mais il est seul. Premier certes, mais tristement seul. Alors Dieu lui donne une femme.

 

La femme, un alter ego

 

Dès qu’elle se présente aux yeux émerveillés d’Adam, il chante sa joie et son amour. Son nom est la forme féminine du nom de l’homme. Par sa féminité, elle accompagne et complète la masculinité d’Adam créé en premier.

 

Car il ne pourra jamais advenir qu’on puisse intervertir l’ordre créationnel que Gn 2.22-24 fixe. Paul rappellera qu’Adam a été formé le premier, Eve ensuite (1 Tm 2.13). Aux Corinthiens, il développera le processus originel: l’homme n’a pas été tiré de la femme, mais la femme de l’homme (1 Co 11.8-9). Mais quelle joie de lire le rééquilibrage magistral qui suit immédiatement: Dans le Seigneur, la femme n’est pas sans l’homme, ni l’homme sans la femme… (v.11-12).

 

Retournons en Eden pour souligner que la chute a modifié la relation homme – femme. Elle s’exprime désormais en notion de rapports de force, par une petite phrase bien lourde de conséquences, tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi (Gn 3.16).

 

Jésus confirme ce triste développement en rappelant la tyrannie des autorités humaines dans la société, mais en rappelant que, dans le royaume de Dieu, il ne doit pas en être ainsi (Mt 20.25-26). Jésus replace l’autorité dans son axe véritable: Dieu est premier, il nous a élus en Christ (Ep 1.4,5,11).

 

Les structures patriarcales, familiales et sociales

 

Dieu appelle Abram en Mésopotamie (Ac 7.2-4). Tout le clan familial se met en route vers Haran. Mais Terah son père est avec lui. Alors Dieu attend que le père meure pour remettre en route Abram (Gn 11.31). La structure patriarcale est ici respectée.

 

Dans le prolongement, le respect dû aux parents subsistera. Le cinquième commandement à la jonction des deux tables de la Loi est Honore ton père et ta mère (Ex 20.12). Puis viennent les anciens. Le mot n’a pas d’abord une signification spécifiquement religieuse. Ce sont des responsables qui ont autorité sur la ville, la région, le pays, un peu comme Adam avait autorité en Eden. Ils dirigent, assument, tranchent dans les litiges en faisant respecter la loi et le droit (en Egypte, Gn 50.7; plus tard en Israël, Ex 3.16). Booz en donne un exemple: il souhaite épouser Ruth mais n’est pas prioritaire dans le droit de rachat; il ne bouscule pas la loi de Dieu et s’en réfère aux anciens.

 

L’Eglise locale dans le Nouveau Testament

 

Les anciens ont une position clé dans la structure de l’Eglise locale. Au départ qui sont-ils exactement ? A la fois des anciens (presbuteroi), des évêques (episcopoî) et des pasteurs (poimeneis). Au cours de l’histoire de l’Eglise, l’équivalence originelle va se diversifier. Mais à l’origine, il n’en était pas ainsi (Ac 20.17,28). Cela ne signifie pas que, tellement semblables, ils finissent par être interchangeables. Les charismes leur sont diversement répartis. Ainsi en est-il de la présidence, de la prédication et de l’enseignement (1 Tm 5.17).

 

Les épîtres pastorales (1 Tm 3 et Tt 1) établissent le profil des anciens sur les plans spirituel, personnel, familial et communautaire. Ils doivent être, à la fois, hommes de confiance et hommes de responsabilités. Prenons garde à ne pas croire que les diacres sont des anciens de 2ème choix ! Ils ont une responsabilité plus pratique, et pourtant également spirituelle.

 

  • Hommes de confiance: c’est ce type d’homme à qui on confie de l’argent (Ac 11.30).

 

  • Hommes de responsabilité: Paul et Barnabas en font nommer pour gérer les Eglises (Ac 14.21-23).

 

L’apôtre Pierre n’hésite pas à endosser la fonction d’ancien. Il en profite pour donner des conseils de prudence et de modération afin que ceux qui sont investis d’une telle autorité l’exercent dans l’esprit du Christ (1 P 5.1-4). Ils ne doivent pas se servir eux-mêmes, mais servir les autres.

 

L’Eglise universelle

 

Sur terre, elle aura des structures d’autorité plus élargies, avec des ministères diversifiés (Ep 4.10-12).

 

Les autorités civiles de ce monde

 

magistratRomains 13.1-7 : ce passage clé est d’autant plus significatif que Paul l’adresse aux bien-aimés de Dieu, appelés à être saints. Ils vivent dans la capitale de l’empire. Le caractère païen du contexte n’annule pas le principe de l’autorité.

 

Ce principe de l’autorité est voulu par Dieu pour le droit, la justice, le bien-être, la protection de ceux qui font le bien. Il oblige donc le chrétien à la soumission, à l’honnêteté qui consiste à payer taxe et impôt. Non par crainte de la punition des hommes mais par motif de conscience devant Dieu. Ces autorités civiles ne peuvent se substituer à Dieu, elles disposent d’une autorité déléguée et auront des comptes à rendre à Dieu comme administrateurs.

 

Et s’il devait y avoir empiétement sur l’obéissance due à Dieu, la résistance s’imposerait. Au besoin jusqu’au martyre. Martyr veut dire témoin. Les martyrs de l’Apocalypse ont bien compris le poids de l’autorité que le Seigneur leur a donné pour rester fidèles envers et contre tout, jusqu’à la mort (Ac 4.18-2). Il faut obéira Dieu plutôt qu’aux hommes (Ac 5.28-29).

 

A Jérusalem, Jésus-Christ est conduit devant deux autorités civiles et politiques : le gouverneur Pilate et le roi Hérode. Jésus respecte l’autorité de Pilate, alors qu’il n’accorde aucun crédit à celle d’Hérode. A Pilate, Jésus répond, explique. Et quand il se tait un bref instant devant les accusations mensongères des sacrificateurs, il précise à Pilate qu’il n’aurait aucun pouvoir s’il ne lui avait été donné par Dieu. Tous ces échanges sont comme autant de perches tendues vers la conscience d’un homme qui sait bien, au fond de lui-même, que le prisonnier est innocent.

 

Il en va tout autrement devant Hérode. Jésus n’ouvre pas la bouche, pas une seule fois. C’est déjà pour le roi Hérode le début d’un jugement divin vers lequel il marche à grands pas.

 

Souvenons-nous…

 

  • autorité déléguée ne signifie pas appropriée,

 

  • gestionnaire n’est pas propriétaire,

 

  • serviteur n’est pas seigneur,

 

  • user de et gérer ne veulent pas dire abuser m exploiter.

J.D.


NOTES

 

1. Ce texte est paru dans 3 numéros de SERVIR : 1° partie dans Servir n°2 Mars-avril 1998, 2° partie dans le numéro n°3 de Mai-juin 1998 et la dernière partie dans le n°4 de Juillet-août 1998.

 

2. Jacques Dubois a été pasteur dans une Eglise Baptiste à Paris, puis à Neuchâtel dans une Eglise Libre. Depuis bientôt 17 ans, il est professeur à l’institut emmaüs. Ce texte, comme ceux qui suivront dans les prochains numéros de Servir, sont un résumé des exposés qu’il a donnés à la Conférence nationale des CAEF à Chevilly-Larue en novembre dernier (1997)

 

3.   Avocat, défenseur.

 

4. L’Actualité religieuse n°157, 15 juillet-août 1997, p. 40.