La bénédiction de Toronto

 

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par Graham HARRISON

 

 

 

 

 

L’article suivant a paru au printemps 1995 dans Foundation, une publication du « Conseil Evangélique Britannique » ; il a été reproduit dans la Revue Réformée de janvier 1996. L’auteur est pasteur de « l’Emmanuel Evangelical Church » à Newport, au Pays de Galles en Grande-Bretagne. Son observation sans parti-pris et ses réflexions basées sur l’Ecriture méritent une lecture attentive.

 

Si le nom de « Bénédiction de Toronto » a été inspiré par l’Eglise du Vineyard1 de la plus cosmopolite des villes canadiennes, et s’est propagé partout dans les Iles Britanniques et en Europe

 

Quelle que soit la première réaction que l’on puisse avoir en entendant des échos de ce qui se passe dans les églises et ailleurs, il serait imprudent de les ignorer et de supposer que, tout comme bon nombre de phénomènes religieux venus d’outre-Atlantique, cela ne durera pas […]. J’ai pour ma part accueilli avec joie l’occasion de visiter deux églises, l’une anglicane, l’autre baptiste, pour me rendre compte par moi-même de ce qui s’y passait […]2.

 

 

1. Que se passe-t-il réellement ?

 

La réunion-type commence par quarante-cinq à soixante minutes de ce que l’on appelle « l’adoration ». Cela consiste invariablement en une suite de chants, type petits chœurs, chacun étant plutôt court et, par conséquent, répété à plusieurs reprises. Le chant est conduit par des musiciens ou des choristes. La plupart des assistants restent debout, nombre d’entre eux les bras levés. La prière est presque toujours accompagnée d’une musique douce en sourdine. Elle s’exprime, parfois, par le chant « en langues » sur fond d’accords harmoniques joués au clavier et/ou à la guitare. Dans les réunions auxquelles j’ai assisté, une prédication a suivi (de quarante minutes pour l’une d’entre elles).

 

Puis est arrivé le moment attendu par tous : l’invocation du Saint-Esprit, qui s’effectue soit simplement par les mots « Viens, Saint-Esprit » ou par une phrase telle que « Nous t’invitons à venir », soit par une prière plus longue et par l’indication donnée à l’assemblée qu’elle va, sans doute, être témoin de choses extraordinaires. L’encouragement est donné de ne pas craindre les réponses ou les manifestations physiques et, le plus souvent, une série de citations bibliques, validant ce qui va se produire, est faite.

 

Pendant ce temps, un espace est dégagé pour que les membres de l’assistance puissent rejoindre les personnes désignées comme faisant partie des « équipes ministérielles » (Ministry Teams) et identifiées par un badge, sage précaution pour empêcher que des personnes non habilitées ne s’infiltrent dans leurs rangs.

 

Dès ce moment, quelques personnes commencent à s’avancer – pour bénéficier du « ministère », qui a mis en œuvre la même technique dans les centres où j’ai été ; ce qui m’a paru fascinant. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une imposition des mains – du moins telle qu’elle se pratique chez les Pentecôtistes classiques. Il s’agit plutôt d’une série de curieux gestes des mains effectuées par un membre de l’équipe, à quelque distance de le tête, du visage, de l’épaule et du torse du destinataire. Dans certains cas, seulement le front, la nuque ou l’épaule est touché d’un seul doigt. Il n’y a jamais la moindre pression de la main pour pousser le sujet en arrière ou pour qu’il tombe. Le plus souvent, les gens s’effondrent plus ou moins rapidement. Cependant, quelques personnes ne s’effondrent pas du tout ; la procédure est alors arrêtée et elles retournent à leur place. Le mot d’« effondrement » n’est pas vraiment approprié pour décrire ce qui se produit ; le mouvement de la descente vers le sol est très doux, le sujet s’affaissant lui-même peu à peu.

 

Il y a des épisodes plus violents. Certaines personnes commencent par une sorte de jogging immobile qui peut durer longtemps. […] J’ai vu des gens se mettre à trembler de tous leurs membres, ou bien faire des bonds violents et répétés sur place. Dans la plupart des cas, ces exercices ont fini par épuiser ceux qui les pratiquaient. Il semble que les manifestations physiques varient selon les lieux qui ont, chacun, leurs propres caractéristiques.

 

C’est en général, lorsque les gens sont par terre, que le rire commence. Ce rire peut varier en nature et en intensité. Certains s’esclaffent discrètement, d’autres rient à gorge déployée, tandis que d’autres encore éclatent d’un rire sonore à faire envie aux sorcières de Macbeth. L’animateur de la réunion, à l’Eglise de la Sainte Trinité à Londres, n’arrêtait pas d’encourager les gens à s’avancer pour bénéficier du « ministère » ou à lever la main pour qu’un équipier puisse aller vers eux. […] Des rugissements de lion et des cris d’autres animaux font partie intégrante des manifestations typiques de la « bénédiction de Toronto ».

 

Il est intéressant d’entendre des témoignages de ceux qui ont expérimenté la « bénédiction ». Aucun ne dit avoir été inconscient alors qu’il était prostré sur le sol. Bien au contraire, tous décrivent cette situation comme étant très agréable. Certains affirment avoir eu la vision d’un personnage beau et lumineux qu’ils ont pris pour le Christ. Nombreux sont ceux qui ont témoigné, à la suite de telles expériences, d’un plus grand amour pour Dieu et d’un intérêt renouvelé pour les choses spirituelles.

 

Tandis que certains considèrent l’ensemble du mouvement comme un réveil spirituel, ses adeptes les plus proches ne le désignent pas ainsi. Ils parlent plutôt d’un pré-réveil, une sorte de pré-dispensation, suggérant qu’y résister revient à résister à l’action du Saint-Esprit. L’un des aspects les plus étonnants du mouvement est l’examen minutieux que ses adhérents ont fait de l’histoire de l’église pour y trouver des exemples de mouvements, analogues à « la bénédiction de Toronto », qui se seraient produits dans des contextes différents et qui auraient été irréprochables sur le plan théologique. Au fond, cette démarche ne diffère en rien des tentatives plutôt naïves faites pour prouver que les plus grandes figures de l’histoire de l’Eglise sont des personnes qui ont parlé en langues.

 

Les « ancêtres spirituels » du mouvement seraient Jonathan EDWARDS et surtout sa femme Sarah. Ellie MUMFORD, tout particulièrement, ne tarit pas d’éloges au sujet de cette dernière, la citant comme une illustration impressionnante des manifestations du mouvement actuel ; avec deux siècles et demi d’avance sur leur apparition à Toronto. Pourtant, une lecture attentive des récits de Jonathan Edwards, à propos des expériences spirituelles de sa femme, ne permet pas, à mon avis, une telle interprétation. En outre, il y a dans les récits d’Edwards, des éléments qui manquent de manière flagrante au mouvement d’aujourd’hui, comme nous le verrons.

 

 

2. Evaluation personnelle

 

Comment tenter une évaluation de ce mouvement ? Il faut, je crois, l’examiner de façon minutieuse sous trois angles avant de l’accepter ou de le refuser en bloc : l’angle biblique et théologique, l’angle historique et l’angle psychologique. Chacun de ces domaines vaut qu’on s’y arrête avec attention. Il conviendra, en outre, de déterminer si l’on n’a que deux choix : tout accepter ou tout rejeter. Est-il possible d’affirmer que des personnes ont été bénies par Dieu lors de ces réunions sans reconnaître l’authenticité des procédés utilisés ? […]

 

A) Angle biblique et théologique

 

Certaines personnes auxquelles j’ai parlé ont soutenu que bien avant d’entendre parler de « la bénédiction de Toronto », un profond sentiment de manque et d’échec les avaient poussées à chercher le Seigneur. Il est bien vrai, n’est-ce pas, que Dieu visite ceux qui le cherchent, pressés par le désir d’être transformés ? Ces personnes auraient très bien pu interpréter de travers ce que le Seigneur a fait et commettre une simple erreur de logique en supposant que la bénédiction leur était venue grâce aux réunions auxquelles elles avaient assisté. Il est donc inutile de dénigrer leur évident progrès spirituel pour critiquer un mouvement que l’on juge gravement sujet à caution, pour ne pas dire plus.

 

Il n’est certes pas difficile de trouver des failles bibliques en considérant le mouvement et ses prétentions. Il me semble que l’assimilation simpliste faite entre ce qui se produit lors de ces réunions et les diverses expériences physiques, relatées dans l’Ecriture, que des hommes des deux Testaments ont vécues dans leur rencontre avec Dieu, frise l’absurde. Les exemples bibliques les plus souvent cités sont les suivants : Ezechiel (1.28 ; 3.23), Daniel (8.17 ; 10.9) et même le roi Saül (1 S 19.24) ainsi que Jean (Ap 1.17) et les soldats venus arrêter Jésus dans le jardin de Gethsémané (Jn 18.6).

 

Même une lecture superficielle de ces textes devrait suffire pour mettre en évidence un monde de différences entre ce qui est dit dans la Bible et le type d’expériences décrites plus haut. Ce qui frappe dans chacun des événements bibliques, c’est le sentiment de crainte respectueuse jointe à la conviction d’une totale indignité. Que ces dispositions aient été présentes dans les réunions où je me suis trouvé, notamment chez les personnes prostrées par terre, riant et sautant, n’était pas évident pour l’observateur. L’ambiance était plutôt à l’hilarité et à l’insouciance, ce qui ne veut pas dire la légèreté.

 

Une enquête serait nécessaire pour mieux cerner le phénomène le plus typique de « la bénédiction de Toronto » : le rire. C’est cet élément qui a retenu l’attention des médias séculiers avec le cynisme que nous sommes habitués à leur voir manifester dès qu’il s’agit d’un événement plus ou moins lié au christianisme. Le malheur c’est que, cette fois-ci, on leur a fourni amplement toutes les armes dont ils avaient besoin. Je voudrais être très clair : je suis pleinement conscient qu’il existe, dans l’histoire de l’église, des exemples d’éclats de rire chez des personnes dont Dieu s’est approché pour les bénir. Certains réveils ont été accompagnés par une telle explosion de joie que celle-ci s’est, parfois, exprimée par le rire. Après tout, le Nouveau Testament ne parle-t-il pas de « joie ineffable et glorieuse » ? Mais il n’est pas vraiment question de cela en l’occurrence, de telle sorte que ce rire est devenu un moment capital dans les réunions.

 

A l’objection que le Psaume 126 verset 2 (« Alors notre bouche riait de joie et notre langue poussait des cris de triomphe ») en est une justification biblique, il convient d’opposer un petit travail effectué avec une concordance et un lexique biblique. Les mots traduits par « rire » (le nom ou le verbe) se trouvent quatre-vingt fois dans l’Ancien Testament. Mis à part l’exemple d’Abraham et de Sarah à l’annonce de la future naissance de leur fils Isaac, ces mots signifient presque toujours le dédain et la dérision exprimés souvent par les ennemis de Dieu contre son peuple et parfois par le Seigneur lui-même contre ses ennemis.

 

Le Nouveau Testament ne fait pas autrement. Le mot « rire » (nom ou verbe) n’y apparaît que six fois. Par trois fois, ce mot décrit la suspicion ironique des auditeurs de Jésus lorsqu’ils affirment que la fille de Jaïrus dort ; une autre fois se situe en Jacques 4 verset 9 où il est dit que le rire se changera en deuil ; ce contraste se trouve deux fois dans l’évangile de Luc (6.21, 25). Aussi est-il abusif de prétendre que, dans l’Ecriture, le rire apparaît comme une manifestation de la bénédiction de Dieu et plus encore d’organiser des réunions dans l’intention expresse de s’exprimer par le rire.

 

Le même raisonnement serait de mise pour l’ébriété. Certains textes (1 S 1.13s ; Ac 2.13s ; Ep 5.18) sont cités à tort pour prouver que les manifestations d’une haute spiritualité peuvent ressembler à l’état d’ivresse et que les expressions physiques associées parfois à « la bénédiction de Toronto » s’inscrivent sur la même ligne. Ce qui suggérerait que Dieu serait à leur origine. Mais dans la Bible, les signes qui accompagnent une expérience profonde de Dieu et un changement de vie sont plutôt le remords face au péché, l’humilité jointe à un intense sentiment d’indignité et non l’hilarité. Pourtant dans les réunions placées dans la mouvance de « la bénédiction de Toronto » auxquelles j’ai assisté, je n’ai rien vu de tel.

 

Bref, ni par les références à l’Ecriture, ni par les façons de s’en servir (c’est-à-dire par leur herméneutique4, pour utiliser le mot noble), les responsables ne réussissent à montrer qu’un précédent ou un principe biblique justifie ce qui est devenu la manifestation type du mouvement.

 

B) Angle historique

 

L’histoire apporte-t-elle le soutien nécessaire ? Etant donné la place que Jonathan Edwards et sa femme Sarah occupent dans la défense du mouvement, on pourrait supposer qu’il existe un lien direct entre leur ville de Northampton en Nouvelle-Angleterre et la cité moderne du Canada. […]

 

Pour le moment, le lien entre les deux époques est pour le moins fragile et flou. En vérité, les Edwards (M. ou Mme) et le mouvement de Toronto sont diamétralement opposés. Il est certain que des phénomènes extraordinaires se sont produits d’une façon générale lors du Grand Réveil, en particulier autour d’Edwards, qui n’a cherché, ni à les expliquer, ni à les encourager, notamment en organisant des réunions.

 

En Nouvelle-Angleterre, on n’a vu ni « équipe ministérielle », ni conseiller agréé pour faire des gestes sur des personnes volontaires avant que certaines s’effondrent en faisant entendre un grand rire rauque. Il y a eu de nombreux cas de convulsions qui se sont produits sans avoir été recherchés. Certes Sarah Edwards a vécu des expériences étonnantes, même de lévitations, selon certains témoignages vrais ou faux ; dans les comptes rendus de son mari, il est clair qu’il ne doutait pas qu’elles fussent d’origine divine. Mais cela n’a rien à voir avec ce qui se passe à Toronto.

 

Contrairement à ce qu’Ellie Mumford et d’autres soutiennent, Sarah Edwards n’a jamais été présentée comme ivre morte plusieurs jours de suite. Elle a vécu des expériences exaltantes de la majesté, de la gloire et de la compassion du Dieu souverain, devant lequel elle sentait sa profonde indignité. Elle reste anonyme dans les récits de son mari qui n’a pas cherché à multiplier les expériences de sa femme dans la colonie ou même dans la ville. Il est certain, si l’on peut se permettre une comparaison, qu’il conduisait en appuyant sur le frein plutôt que sur l’accélérateur !

 

Les mêmes remarques peuvent s’appliquer au Réveil de 1859 en Irlande du Nord. Il y eut des cas de prostration et de personnes en transe, parfois pour de longues périodes. Mais, encore une fois, il faut insister sur le fait que ces choses se sont produites d’elles-mêmes et n’ont pas constitué un élément du programme du Réveil. En Irlande du Nord comme lors du Grand Réveil, du Réveil méthodiste et de beaucoup d’autres encore, une multitude de personnes se sont converties. C’est bien souvent en liaison avec les troubles que peuvent causer ce grand mouvement de conversion que les phénomènes physiques les plus étonnants se sont produits.

 

C) Angle psychologique

 

II est légitime de se demander si certains phénomènes ne s’expliquent pas d’un point de vue psychologique. Evoquer cette possibilité ne revient pas à se ranger dans le camp de ceux qui pensent que proposer une description psychologique des phénomènes religieux, c’est leur enlever toute signification pour des personnes intelligentes. Il s’agit plutôt de reconnaître que de nombreuses manifestations religieuses relèvent plus du domaine de la psychologie que du domaine spirituel. Ne pas l’admettre peut sérieusement nuire à la cause du Christ et avoir ainsi des conséquences néfastes pour ceux qui se laissent porter par le courant, croyant à tort que c’est par le Saint-Esprit. Beaucoup d’entre eux font naufrage spirituellement, ce qui fait dire aux sceptiques : « je vous l’avais bien dit ! »

 

Mais est-il juste de charger ainsi ces activités et ceux qui les propagent ? Certains objectent aussitôt que ces éléments dangereux sont absents des réunions. Ils soulignent que, dans la plupart des cas, celles-ci se déroulent sur le mode charismatique normal et modéré : un moment d’adoration au début, des chants et des chœurs familiers, un accompagnement musical, etc. Je reconnais volontiers que mon propos a des implications qui débordent largement ce déroulement particulier. J’affirme, cependant, que ce type d’adoration même relativement calme et peu émotionnel (le plus souvent) est très puissant, subtilement, en raison de la pression psychologique qu’il exerce sur les participants.

 

Considérez les facteurs suivants. L’ambiance est relaxe et décontractée. Les gens ne sont pas sur leurs gardes. La musique est répétitive ainsi que les paroles chantées, et n’exige qu’un faible effort de concentration. Le moment pendant lequel l’assistance reste debout les bras levés et les yeux clos est suffisamment long pour entraîner une lassitude physique et psychologique. Le tout concourt à créer un état soporifique où chacun est tout à fait prêt à faire bon accueil à ce qui lui est proposé. Bien des personnes se rendent aux réunions avec un esprit prédisposé en faveur des phénomènes qu’ils escomptent y voir.

 

Sans vouloir accuser les animateurs de ces réunions de la moindre mauvaise intention, il faut néanmoins reconnaître qu’ils sont experts dans l’art de diriger les émotions collectives. Ils savent contrôler le rythme de la réunion, discerner le moment propice pour le ralentir et l’accélérer, susciter une émotion en utilisant adroitement la musique. Ils formulent de temps à autre des remarques fustigeant, parfois, ceux qui seraient susceptibles de désapprouver ce qui ce passe, suggérant que le Seigneur est présent d’une manière exceptionnelle et qu’il va faire des choses remarquables. Tout cela contribue, même si l’on ne veut pas l’admettre, à créer une atmosphère intensément chargée d’émotions, qui pèsent sur ceux qui commencent à se sentir spirituellement insuffisants et coupables d’avoir eu des réserves quant à la validité des manifestations.

 

Considérons maintenant les gestes particuliers de la main faits par les équipiers auprès d’un candidat. Ces gestes étranges n’ont aucun précédent biblique. Un article intéressant du Time Magazine5 a décrit ce qu’il a appelé « la thérapie du non touché ». Il n’est pas fait allusion au mouvement de Toronto mais impossible de ne pas y penser.

 

« Tenant les mains à quelques centimètres du patient assis, l’infirmière fait des gestes autour de son corps, de la tête au pied, comme si elle ôtait des toiles d’araignées. A la fin de chacun de ses amples mouvements, elle fait, les yeux fermés, un geste brusque des mains, comme pour égoutter de l’eau. Tels sont les gestes de la « thérapie du non touché », une forme de thérapie très controversée qui gagne de plus en plus le monde médical aux Etats-Unis et dans de nombreux autres pays. Selon ses partisans, cette thérapie est à même, non seulement de réconforter et de décontracter les patients, mais aussi de calmer la douleur, de produire des modifications au niveau du sang et de favoriser la guérison.

 

Ou bien comme le prétendent ses détracteurs, cette thérapie est-elle une spécialité du Nouvel Age, une sorte d’imposition des mains, sans contact physique, qui n’a pas de place légitime en médecine ? »

 

Autre facteur significatif : certaines personnes font l’expérience de ce qui s’appelle, je crois, une « régression hypnotique ». L’artiste hypnotiseur, après avoir mis le sujet en état d’hypnose, implante dans son subconscient un mot ou une phrase. Lorsque le sujet sort de son état de transe, il suffit que ce mot ou cette phrase soit répété pour le replonger dans un état d’hypnose. Ellie Mumford raconte comment un pasteur américain, ayant subi l’effet Toronto, à l’Eglise du Vineyard, au moment de l’invocation « viens, Saint-Esprit », s’est retrouvé de nouveau par terre au moment même où il écrivait ces mots, en rédigeant un compte rendu pour son journal paroissial.

 

Ce récit a été accueilli par un grand éclat de rire, qui n’a fait que redoubler, lorsqu’il a dit avoir fait la même expérience en inscrivant cette expérience sur son agenda, alors qu’il effectuait un vol avec Air France au-dessus de l’Atlantique. Selon plusieurs témoignages, il semblerait qu’après avoir vécu cette expérience, la plupart des gens cherchent à la renouveler comme s’ils n’arrivaient plus à s’en passer. L’ayant vécue le dimanche précédent, ils en ont de nouveau besoin. Quoi de mal à cela ?

 

Ne cherchons-nous pas tous à mieux connaître la grâce de Dieu ? Certainement. Mais je suis tout de même assailli par le doute. Où ai-je déjà entendu cela ? La réponse est : chez les drogués. Ce phénomène de la bénédiction de Toronto » serait-il une expression « chrétienne » de dépendance ? Pour ma part, je n’ai pas pu trouver, dans le Nouveau Testament, d’exemple parallèle pour justifier de tels usages.

 

 

Conclusion

 

A mon grand regret (en disant cela, je suis sincère), je n’ai rien trouvé pour me convaincre du bien-fondé des principes de « la bénédiction de Toronto », bien que des milliers de chrétiens l’aient adoptée. Je ne mets pas en doute leur sincérité, et je ne trouve pas nécessaire d’affirmer que le Seigneur n’a béni aucun d’entre eux. En toute honnêteté, je n’ai perçu rien de sinistre ou de satanique lors des réunions auxquelles j’ai assisté. Je rappelle, pourtant, que les Ecritures disent que Satan revêt l’apparence d’un ange de lumière et use de ruse et de machination.

 

Je suis de plus en plus persuadé qu’à un certain moment il faudra :

 

1. réparer d’importants dégâts, secourir des chrétiens blessés et pleins de désillusions, et présenter le véritable Evangile à des non-croyants endurcis, et

 

2. qu’heureusement un autre Grand Réveil poussera dans l’obscurité de l’oubli tout souvenir de ces prétendues bénédictions6.

 

G.H.


NOTES

 

1. « Vineyard » signifie vignoble en anglais.

 

2. L’auteur cite en outre plusieurs vidéocassettes et émissions qu’il a visionnées. Il a assisté à d’autres rencontres et lu de nombreux articles sur la « Bénédiction de Toronto ».

 

3. Jonathan Edwards (1703-1758), théologien calviniste, prédicateur du Réveil en Nouvelle-Angleterre.

 

4. Leur interprétation.

 

5. Time du 24 novembre 1994, page 82. Je remercie mon ami, le pasteur John EDMONDS de South Woodford, de m’avoir remis cet article.

 

6. Plusieurs articles ont déjà été publiés à ce sujet. Voir, par exemple, The Churchman (109:1.2) ou la brochure de J. McArthur, La bénédiction de Toronto à la lumière de la Parole de Dieu (Genève : Maison de la Bible, 1995).