Temoignage

 

Un Juge clément

 balance

par Gérard Peilhon

 

 

« Philippe, attends-toi à une condamnation sévère. Les faits pour lesquels tu viens de passer aux Assises sont extrêmement graves ».

 

 

 

Dans la petite salle, où le Président de séance m’a accordé l’autorisation de voir l’inculpé, j’ai rejoint celui-ci. Ma main posée sur son épaule, je prie pour que Philippe reste accroché à la Parole de Dieu qu’il a découverte, lors de son incarcération au Centre Pénitentiaire où je suis aumônier protestant. Ses yeux luisants de larmes traduisent sa reconnaissance. « Abonnez-moi pour deux ans à EPI1, je vous ferai parvenir le montant, via le comptable de la prison ; je veux aussi continuer à envoyer régulièrement ma participation financière à une œuvre chrétienne. »

 

Quand je quitte Philippe, les jurés continuent à délibérer. Le lendemain, en 1ère page du Progrès, j’apprendrai la lourdeur du verdict. Il est condamné à trente ans de réclusion. Il n’a que vingt-huit ans.
 

Voilà des mois que je visite cet homme coupable de meurtres. La haine du début a fondu sous les rayons bienfaisants de la Parole et de l’amour de Dieu. Il a lancé sa prière de repentance et de foi, que l’oreille de Dieu a captée, ce Dieu clément qui ne nous traite pas selon nos péchés.
 

Il a refusé la télé dans sa cellule afin de lire sa Bible plusieurs fois par jour. Il fait du sport pour conserver « une âme saine dans un corps sain ». Jamais il n’a raté les rencontres bibliques que j’organise. Mais l’Avocat Général n’a nullement tenu compte du changement opéré dans la vie de ce meurtrier durant sa détention, changement constaté par les surveillants, ses avocats, ses copains de détention…
 

Malheureusement, dix jours plus tard, Philippe se suicidait dans sa cellule d’une prison de Lyon, véritable cul-de-basse-fosse du système pénitentiaire.
 

Pourtant, je sais que Dieu l’a accueilli dans Sa maison, malgré son geste désespéré.
 

Le portrait tracé par l’Avocat Général était celui d’un « monstre de cynisme, sans remords, candidat à la récidive ». A chaque affirmation je ressentais la douleur morale que subissait l’accusé. J’avais envie de crier le changement évident survenu dans la vie du coupable. J’ai voulu témoigner à la barre mais le Président a refusé la demande adressée par les avocats de la défense.
 

Heureusement que Dieu ne nous enferme pas dans notre passé de culpabilité !
 

S’il le faisait, jamais je n’aurais pu avoir un tel ministère.
 

Mais la mort de Jésus-Christ nous a acquis, et pour Philippe aussi, la clémence du Dieu saint, juge suprême de tous les hommes.

 

G.P.
 


Note
 

1. : Méthode de lecture biblique journalière, éditée par « La Ligue pour la Lecture de la Bible »