Notes de lecture

Pour prolonger cette réflexion sur la souffrance, nous vous recommandons la
lecture du livre d’où est extrait l’article des pages précédentes ; Monsieur Alfred
KUEN nous le présente. :

 

Quand le ciel est silencieux

 

Dieu est-il indifférent à nos souffrances ?

 

 femme-pensive

par Alfred KUEN

 

Voilà bien le meilleur livre que j’ai lu depuis des années : honnête, vrai, n’éludant pas les problèmes que nous pose la vie chrétienne – en particulier le plus troublant d’entre eux : pourquoi le juste doit-il souffrir et passer par toutes sortes d’épreuves ? Bien des hommes de la Bible y ont été confrontés :Job, Jérémie, David (Ps 37), Asaph (Ps 73)

 

Dans beaucoup de milieux chrétiens circulent encore des opinions semblables à celles que défendaient les amis de Job : « S’il t’arrive un pépin ou si tu es malade, c’est que tu as péché. Dieu te punit. Repens-toi et tout s’arrangera pour toi », ou des slogans comme « Un chrétien n’est jamais dépressif. Vous n’avez besoin que de la Bible et de la prière pour vous en sortir ! ».

 

*Ronald Dunn a entendu tout cela autour de lui durant les dix années où il a lutté contre une profonde dépression à la suite du suicide de son fils. Pas étonnant qu’il ait dit avoir trouvé plus de compréhension dans « le monde » que dans l’Eglise !

 

Lors d’une conférence devant 1300 pasteurs où il a parlé ouvertement de ce qu’il avait vécu, un assistant l’a félicité d’avoir « risqué sa réputation en étant transparent », c’est-à-dire en avouant les difficultés qu’il avait connues et celles des chrétiens dépressifs – sans recommander uniquement des remèdes spirituels. En un temps fasciné par « l’attrait irrésistible de l’expérience qui nous transforme instantanément », il faut effectivement du courage pour prendre le contre-pied et pour oser éclairer « l’autre versant de la vie abondante » et « le côté sombre de la grâce ».

 

Et pourtant, si le Christ lui-même a dû être élevé à la perfection par la souffrance (Hb 2.10), peut-il court-circuiter ce chemin pénible pour nous ? Si, bien qu’étant Fils, II a appris l’obéissance par tout ce qu’il a souffert (5.8), comment pourrions-nous l’apprendre sans cet « étrange serviteur de Dieu » qu’est la souffrance ? Sur la croix, Jésus s’est écrié : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Depuis lors, bien des chrétiens troublés par les « dissonances » de leur vie et la disparité entre leur foi et leur expérience ont répété cette question angoissante.

 

Pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Dunn reprend un à un ces cris du cœur dans son livre. A la lumière de ce qu’il a vécu, il nous initie au « ministère de la déception » : lorsque nos espoirs sont déçus l’un après l’autre et que seul le silence répond à nos pourquoi, lorsque les tempêtes de la vie risquent de renverser notre barque, nous apprenons que les pensées de Dieu ne sont pas les nôtres (Es 55.8).

 

L’auteur de ce livre a traversé la vallée où règnent les ténèbres de la mort (Ps 23.4), il a touché le fond du gouffre, mais, nous dit-il, ce fond est solide : nous pouvons nous appuyer dessus pour remonter la pente. Il nous montre par son exemple comment Dieu agit au travers de la souffrance et des épreuves. « La foi n’est pas nécessairement la force qui change les choses pour qu’elles soient comme nous les voudrions, mais le courage de les affronter telles qu’elles sont », car « si Dieu dit non, ce n’est pas pour nous priver d’une bénédiction, c’est parce qu’il en a une plus grande en réserve pour nous ».

 

Toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu (Rm 8.28). Ce verset qu’on nous lance souvent un peu légèrement à la tête aux moments difficiles, il le confirme, mais après avoir goûté pendant tant et tant d’années l’amertume de ces choses. « L’action la plus profonde de Dieu dans ma vie, dit-il, s’est faite contre mes désirs et contre ma volonté ». L’une des bénédictions que Dieu a accordées à Ronald Dunn, c’est de pouvoir apporter, à des milliers de chrétiens éprouvés, le témoignage de son expérience en en parlant avec une entière liberté et même – ce qui ne gâte rien – avec un humour typiquement anglophone. Nous en bénéficions à travers ce livre.

 

Nous n’avons pas l’explication finale des voies de Dieu ici-bas, mais à certains tournants où nous dominons un bout du chemin parcouru, nous pouvons soupçonner le sens de certaines épreuves qui nous ont rapprochés de Lui et apporté dans notre vie des bénédictions plus précieuses que les pertes subies. A travers le temps pour perdre par lequel le Seigneur m’a fait passer moi-même par le décès de notre fils et de ma femme, je ne puis que confirmer les vérités exposées dans ce livre. Je suis reconnaissant de ce qu’il soit à présent disponible pour le public francophone.

 

Alfred Kuen, St-Légier, Janvier 1998