Grandeur, obstacles et nécessités

 

de la communion fraternelle

 

 repas

 

par Guy GENTIZON

 

 

La communion fraternelle est une source de joie profonde. « Oh ! Quel plaisir et quel bonheur lorsque des frères sont à demeure unis ensemble »1. Elle constituait un des éléments essentiels de la vie de l’Eglise du premier siècle. Et le témoignage apostolique tirait sa force de persuasion de cette manifestation d’amour mutuel vécu par cette communauté de Jérusalem (Actes 2.42-47 ; 4.32-35).

 

 

A. Pourquoi la communion fraternelle est-elle si importante ?

 

1 ) Dieu est amour (1 Jean 4.8).

« l’amour consiste à rendre heureux, à partager avec d’autres le bonheur que l’on possède… L’amour constituait l’essence même des trois personnes divines. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit jouissaient de toute éternité d’une communion parfaite dans cet amour »2.

 

Créé à l’image de Dieu, l’homme est appelé à refléter cette caractéristique essentielle de son Créateur. L’amour devient le signe par excellence de la créature régénérée par l’action du Saint-Esprit (Jean 13.34-35, 17.20-21).

 

2 ) La famille de Dieu.

 

Né à la vie nouvelle en tant qu’individu (Jean 3.3), le chrétien découvre qu’il n’est pas orphelin. Il fait désormais partie de la grande famille du Père. « Les nombreuses expressions que le Nouveau Testament emploie pour désigner l’Eglise sont des noms au pluriel (frères, enfants, saints, disciples) ou des noms collectifs (troupeau, nation, peuple)3 ». Dieu n’a donc pas seulement voulu sauver des individus, mais susciter un peuple, une nouvelle société : L’Eglise.

 

3 ) Accueilli par le Père, mais pécheur tout de même !

 

Malgré la régénération et ses bienheureuses conséquences, le péché reste le lot de l’homme régénéré (1 Jean 1.10). Par conséquent il n’est pas à l’abri des tentations, désobéissances et chutes diverses. Dans le partage fraternel il va trouver des forces nouvelles pour déposer ses fardeaux, résister au péché (Galates6.1-2, Hébreux 10.24-25). D’autre part, le fait de partager régulièrement la Cène lui donne une occasion non négligeable de s’examiner lui-même (1 Corinthiens 11.28-32).

 

4 ) Le partage des biens matériels (Actes 2.44-45, 4.32 ; 2 Corinthiens 9.13 ; Hébreux 13.16).

 

La pauvreté, le chômage et les détresses matérielles de toutes sortes atteignent progressivement les pays occidentaux, L’Eglise est constamment sollicitée. Avec discernement et sagesse elle est appelée à gérer les biens que Dieu lui confie, sans fermer son cœur (1 Jean 3.17).

 

5 ) La compréhension de l’Ecriture (Actes 8.30).

 

La Bible reste un livre difficile à comprendre (2 Pierre 3.16). Dieu donne des ministères à son peuple (Ephésiens 4.11-16). L’étude communautaire de la Parole apporte une dimension essentielle à cette lecture (Néhémie 8.8).

 

6 ) Le fruit de l’Esprit (Galates 5.22-23).

 

Nous avons besoin des autres pour progresser dans notre nouvelle vie. Le fruit de l’Esprit est quelque chose qui ne se vit pas seul. Il faut au moins être deux pour pouvoir manifester l’amour, la patience, etc.

 

7 ) Les dons de l’Esprit (Romains 12.1-8).

 

dons

 

 

Chaque chrétien reçoit au moins un don spirituel, qu’il est appelé à mettre au service de la communauté (1 Pierre 4.10).

 

Pour découvrir, discerner, éprouver ce ou ces dons, le concours des frères et sœurs se révèle indispensable. De même des ministères peuvent naître, fruits des besoins pressentis et apportés dans la prière par l’assemblée (Matthieu 9.37-38).

 

 

 

8 )  Résister à l’Adversaire.

 

Nous n’ignorons pas l’existence et les agissements de l’Adversaire (1 Pierre 5.8). Une personne isolée sera une proie toujours plus facilement accessible à ses attaques.

 

9 ) Pour atteindre le but que Dieu nous fixe : la recherche de Sa volonté.

 

Certaines décisions importantes de la vie chrétienne peuvent trouver une confirmation bienfaisante à travers le partage fraternel, même si, en définitive la décision finale revient à l’intéressé (Proverbes 15.22, 18.1,24.6).

 

En résumé : la communion fraternelle non seulement est le signe par excellence que Dieu suscite pour manifester Christ au monde, mais encore elle est source de riches bénédictions diverses. Cependant une communion fraternelle authentique n’est facile ni à rencontrer, ni à cultiver. Divers obstacles se dressent sur notre route. Nous énumérerons les principaux.

 

 

B. Les obstacles à la communion fraternelle.

 

C’est un besoin fondamental pour l’homme que de chercher des relations avec autrui, Simultanément un instinct de conservation nuit à ces relations. L’Eglise n’échappe pas à cette tension. Si nous refusons le piège de l’idéalisme (même Jésus avait des degrés divers et privilégiés de relations avec certains disciples) il nous faut admettre que trop souvent nous nous contentons de relations fonctionnelles entre enfants issus du même Père4. Parmi les causes fondamentales de ces difficultés relationnelles, soulignons :

 

1 ) Une relation avec Dieu inexistante ou déficiente.

 

« C’est la bonne relation que j’ai avec mon Père céleste qui va m’aider à avoir de bonnes relations avec les autres. Plus je m’ouvre à l’amour de Dieu qui me guérit intérieurement, plus j’abandonne mes attitudes de méfiance, de rejet des autres acquises antérieurement »5.

 

2 ) Le péché et ses ravages.

 

a) Les péchés que nous pratiquons ou cultivons (« les œuvres de la chair »).

Plusieurs listes sont mentionnées dans les épîtres (par exemple : Galates 5.19-21 ; Colossiens 3.5-8 ; 1 Pierre 2.1). Leur lecture dans une version moderne, voire paraphrasée (Parole Vivante par exemple) aura l’avantage de mieux nous en faire saisir les multiples facettes, qui sont tout autant de sources possibles de ruptures relationnelles avec nos frères et sœurs au sein de l’Eglise.

 

b) Les « péchés » que nous avons subis.

Que de blocages psychologiques produisent une image négative de soi, qui paralyse ou limite les contacts (« tu ne vaux rien, tu ne feras jamais rien de bon »). Dans cette catégorie on peut inclure les problèmes affectifs (foyers désunis, alcoolisme).

 

c) Les obstacles divers liés à notre arrière-plan.

Problèmes d’ordre culturel, situations sociales ou professionnelles qui peuvent complexer ou au contraire donner un sentiment de supériorité ! Contexte familial qui a façonné des habitudes de vie (enfant unique, famille nombreuse). Les tensions sous-jacentes ainsi que les solutions apportées dans Romains 14 en sont une illustration pertinente.

 

3 ) L’action de l’Adversaire.

 

Le diable (grec : diabolos = celui qui divise). Nous n’avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les principautés, contre les pouvoirs, contre les dominateurs des ténèbres d’ici-bas, contre les esprits du mal dans les lieux célestes (Ephésiens 6.12).

 

Sachons donc discerner les ruses de guerre de l’Adversaire de nos âmes et ses influences néfastes qui peuvent accentuer de manière non négligeable les difficultés relationnelles (esprit d’avarice, de susceptibilité, préjugés, etc.). Sans chercher à accentuer cet aspect – notamment dans des questions de personnalités et de caractères – ne le négligeons pas !

 

 

C. Nécessités de la communion fraternelle.

 

Enfin, il nous semble utile de souligner quelques-unes des responsabilités qui incombent à chacun, afin que de bonnes relations puissent se développer au sein de nos Assemblées.

 

 

1 ) Participation aux rencontres de la communauté (Hébreux 10.25).

 

groupe

 A une époque où l’individualisme est prôné, écoutons cette exhortation : « Le navigateur solitaire, le chrétien franc-tireur, ne se prive pas seulement de la bénédiction qu’il devrait recevoir des autres, mais il les prive de ce qu’il pourrait leur apporter6.

 

2 ) II est nécessaire de prendre et d’accepter ma place au sein du corps de Christ (1 Corinthiens 12.14-17).

 

Accepter mes dons, ceux des autres, mais aussi les limitations de chacun. Dans un corps les rôles sont différents mais complémentaires (1 Pierre 5.5).

 

3 ) Vivre le pardon (Colossiens 3.13).

 

Nous avons tous des cicatrices, des expériences de vie qui nous ont marqués et qui peuvent être ravivées par des propos ou des attitudes douloureuses. En Christ il est possible de ne pas entretenir ces blessures, au risque, sinon, qu’elles dégénèrent en amertume produisant des fruits amers (Hébreux 12.15).

 

4 ) Veiller les uns sur les autres (Hébreux 10.24).

 

Ce n’est pas espionner, juger son frère, mais avoir le souci de son bien-être spirituel (Galates 6.1-2). L’aider, l’encourager, le redresser avec douceur le cas échéant en l’instruisant (Colossiens 3.16).

 

5 ) Savoir prendre des initiatives (Hébreux 13.1-2).

 

Cela peut signifier tout simplement faire le premier pas pour saluer une personne nouvelle, ou s’inviter pour partager un repas dans un foyer. Mais les possibilités sont illimitées pour qui veut abonder dans ce sens…

 

6 ) Développer la communication.

 

Faire des efforts dans ce domaine est primordial. Que de quiproquos sont nés d’une mauvaise interprétation des gestes ou paroles. Il n’y a pas de véritable communion fraternelle sans une véritable communication.

 

7 ) Un esprit de bonne volonté (Ephésiens 4.1-3 ; Colossiens 3.12-13).

 

Le désir que Christ soit en tout le premier est un puissant stimulant pour développer un esprit d’abnégation indispensable pour cultiver la communion fraternelle.

 

 

Conclusion :

 

Ces différents aspects de la communion fraternelle pourraient sans aucun doute être enrichis d’autres facettes importantes. Notre travail s’est voulu aussi réaliste que possible, notamment en remettant des questionnaires inhérents à ce thème aux frères et sœurs de différentes communautés. L’intérêt suscité par ces réflexions m’a encouragé à vous partager l’essentiel de ce qu’il en est ressorti. C’est pourquoi je m’associe de tout cœur à cette parole de Paul : « Ce que je demande dans mes prières, c’est que votre amour augmente de plus en plus en connaissance et en pleine intelligence pour le discernement des choses les meilleures, afin que vous soyez purs et irréprochables pour le jour de Christ » (Philippiens 1.9-10).

 

G.G.

 

P-S. : Notre frère accueillera avec reconnaissance remarques et suggestions des lecteurs sur ce sujet.

 


 

NOTES

 

 

1. Psaume 133.1, version Louanges pour notre temps.

 

2. A.Kuen, Pourquoi l’Eglise ? p. 17,18.

 

3. cf. M. Griffiths, Belle mais délaissée, p. 16.

 

4. Par fonctionnelles s’entend le type de relation que nous pouvons avoir par nécessité. Ainsi avec le boulanger pour acheter du pain ou avec le facteur qui nous apporte le courrier.

 

5. cf. J. Poujol, L’équilibre psychologique du chrétien, p. 63.

 

6. cf. M. Griffiths, ibid., p. 50.