La meilleure attaque, c’est la fuite !

 

Fuis les passions de la jeunesse et recherche la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un coeur pur. 2 Timothée 2.22

 

Par MATHIEU GANGLOFF,

PASTEUR À LA ROCHE-SUR-YON

 

 

 

 

Que pensez-vous de ce texte ? Vous l’avez certainement déjà lu, plusieurs fois peut-être… Ne trouvez-vous pas l’expression « fuir les passions de la jeunesse » un peu curieuse ? Et que veut dire rechercher la justice, la foi, l’amour et la paix ? Comment faire pour y arriver ?

 

 

 

Fuir les passions…

 

Certains auront vite fait de se dire que Dieu est contre ce qui est passionnant dans la vie et qu’il veut tout simplement que nous vivions des choses très banales, dénuées de sel, très rigides, peut-être « à l’ancienne » dans le respect absolu de la tradition, mais surtout pas de passion, pas de vie… Malheureusement, je crois que beaucoup de chrétiens envisagent la vie de cette façon. Et ce n’est pas juste.

Non seulement cette façon de lire le texte est tout à fait fausse, mais en plus elle dénature Dieu. Dieu n’est pas contre la passion, bien au contraire ! On trouve mention de cette passion ou de cet amour fou à bien des occasions dans la Bible, comme en Zacharie 8.2. Un livre entier de la Bible, le Cantique des cantiques, est consacré à la passion. Dieu lui-même est passionné par bien des choses : les hommes, les femmes, les enfants, son peuple, ses créatures en général… Une passion si forte qu’il s’est même offert par passion ! On parle d’ailleurs de la passion du Christ pour parler de cet événement !

Alors quoi ? Dieu aurait le droit d’être passionné et pas nous ? Non, en fait, Dieu ne nous interdit en aucune manière d’être passionnés… Dans ce cas, que veut dire ce texte ?

Dans 2 Timothée, le mot « passion » peut être traduit d’autres façons : « désirs » (NBS, PDV), « convoitises » (Darby), « passions… désirs… convoitises » (PVV).

Il est question ici de désirs mauvais, de convoitise, de choses perverses qui détournent une personne de Dieu et non des passions-hobbies que l’on peut avoir les uns et les autres… La différence est de taille !

Dieu n’est pas contre la musique jeune, le sport, la philatélie, l’informatique… Attention je vais peut-être vous choquer : il n’est pas non plus contre le poker ou tout jeu de cartes, contre la télévision, les films d’action, les jeux vidéos ou toute autre chose qui peut être un passe-temps qui nous passionne.

En fait, la question n’est pas de savoir ce qui est « chrétien » ou pas, ou ce qui est « biblique » ou pas. La question, c’est l’usage qui en est fait. On peut par exemple jouer entre chrétiens ou même avec des amis non chrétiens en gardant le cap, proposé par Paul, de la justice, de la foi, de l’amour et de la paix ! Il n’y aurait rien de surprenant à penser que Jésus et les disciples ont pris du temps pour rigoler ensemble et jouer à des jeux d’époque pour se détendre… Qu’y aurait-il de mal à cela ? Dieu se réjouit de nous voir heureux les uns et les autres ! Prétendre le contraire, c’est donner de Dieu une image non pas d’un père aimant, mais d’un Dieu lointain, froid et antipathique, à l’opposé de la révélation que nous en avons dans la Bible !

 

 

 

Recherche…

 

Paul invite Timothée à rechercher, au contraire des désirs mauvais et de la convoitise, la justice, la foi, l’amour, la paix… Cela vous semble évident et très logique, mais arrêtons- nous un instant. Ici, Paul ne parle pas à quelqu’un d’ignorant, ou à un jeune converti qui découvre la vie chrétienne et l’Église. Il ne parle pas non plus à quelqu’un qui avait une vie déréglée. Timothée était un responsable d’église, certes jeune – 35 ans tout de même ! –, mais qui avait fait ses preuves, en voyageant avec Paul notamment. Il avait un talent oratoire certain, un bon enseignement gravé dans son coeur de longue date (2 Tm 3.15), les frères rendaient de lui un bon témoignage (Ac 16.2), il avait été reconnu par d’autres apôtres (1 Tm 4.14).

On retrouve la même exhortation en 1 Timothée 6.11 : Pour toi, homme de Dieu, fuis ces choses et recherche la justice, la piété, la foi, l’amour, la patience, la douceur.

Cet avertissement doit donc nous interpeller… Si Timothée, brillant disciple de Paul, responsable d’Église à qui l’apôtre donnait toute sa confiance, est concerné par ces paroles, à combien plus forte raison sommes-nous concernés par cette mise en garde ! Ce ne sont pas que les jeunes qui sont visés ici, mais tous les chrétiens, qu’ils aient une certaine expérience ou une expérience certaine !

 

 

Que doit-on rechercher ?

 

La justice d’abord – certains parlent de l’intégrité. Il est très facile aujourd’hui de se cacher derrière un « tout le monde le fait » pour faire à son tour quelque chose de profondément injuste. Tout le monde triche en cours, je vais faire de même. Je me souviens que le jour d’une évaluation pour le bac, en sport, nous devions lancer les poids. Tous mes copains ont avancé leur poids de 1 à 4 mètres après leur lancer pour améliorer leur note. Le prof avait le dos tourné, et la tentation fut grande de faire de même. Je ne l’ai finalement pas fait, mais cela m’a demandé du courage. Être juste aujourd’hui, c’est une marque de courage. Le courage, ce n’est pas foncer à la Rambo, mais bien savoir se lever et dénoncer les injustices et agir soi-même avec intégrité, à l’image d’un Daniel ou de ses trois amis, d’une Esther et de tant d’autres exemples bibliques courageux. Mais aussi savoir dénoncer ses propres injustices, et cela demande de l’humilité. Justice, courage et humilité sont intimement liés.

L’autre chose à rechercher, c’est la foi. La foi, c’est l’assurance des choses énoncées par Dieu qui ne sont pas forcément visibles. Croire que Dieu tient ses promesses, lui faire confiance en toute chose. Là aussi, humilité et courage sont nécessaires. Avoir confiance en Dieu alors que toutes les circonstances semblent nous montrer que nous sommes abandonnés. Avoir confiance en Dieu, alors que l’on est en plein échec scolaire, professionnel, relationnel. Avoir confiance en Dieu, alors que tout va mal et que notre corps souffre… Dans le Psaume 23, David témoigne de sa confiance, de sa foi en Dieu, alors même qu’il passe par la vallée de l’ombre de la mort. C’est cette foi-là que nous devons rechercher…

L’amour. Ah, l’amour ! On le recherche tant… D’ailleurs, entre la justice, la foi, l’amour et la paix, c’est certainement l’amour que l’on recherche le plus ! Mais peut-être faut-il reformuler la question ainsi : « Où le cherche-t-on ? » Si la recherche se fait au mauvais endroit, on trouvera certainement des pseudo-amours… mais pas l’Amour ! L’Amour absolu, total, infini ne peut pas se trouver chez un autre être humain… L’Amour se trouve en Dieu seul. Nombreux sont ceux qui courent après un amour qu’ils pourraient recevoir, sans jamais réaliser que Dieu a donné son Amour pour tous sans poser aucune condition (Jn 3.16-18).

La paix. Rechercher la Paix de Dieu bien sûr, et aussi la paix avec les autres. La paix avec ses parents ou avec ses enfants, avec ses frères et soeurs, avec les autres membres de l’Église, avec les voisins… Le conseil de Paul en Philippiens 4.5-6 est des plus judicieux en la matière. Car nous ne pouvons être artisans de paix que si nous-mêmes avons trouvé la paix offerte par Jésus- Christ.

 

 

Comment faire ?

 

Le verset de 2 Timothée nous encourage à rechercher toutes ces choses avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un coeur pur. Vivre sa foi en solitaire comme on part faire le tour du monde à la voile, ce n’est pas ce que Paul recommande à Timothée. Au contraire, il l’encourage à se rapprocher d’autres qui partagent le même combat et à faire route avec eux. Timothée ne doit donc pas s’isoler pour vivre une vie pieuse, mais plutôt prendre sa place en tant que membre du corps du Christ et chercher à collaborer avec les autres membres pour le bien du corps.

Quand on avance à plusieurs, il est plus facile de faire face aux obstacles. Au moment où j’écris ces lignes se déroule le Tournoi des 6 Nations de rugby. L’image de la mêlée me semble une bonne image pour illustrer ce texte. C’est en faisant une mêlée compacte, en allant dans le même sens que les autres, en gardant le même rythme, que je peux progresser et aider les autres à progresser. Imaginez un instant qu’un homme (même si c’est Chabal) veuille affronter la mêlée adverse. Bien que tout en muscle, il ne pourrait avancer ou même résister à l’offensive adverse.

La recommandation de Paul de se joindre à d’autres qui ont la même envie de servir Dieu est un excellent conseil pour pouvoir progresser dans la vie spirituelle. Si Jésus- Christ a fondé l’Église, c’est bien aussi pour que nous allions de l’avant ensemble. Qu’il nous aide à le faire, à fuir les désirs mauvais et à rechercher ce qui est bon pour nous !

 

M.G.