Conférence 1:

 

Soif, sexe et satisfaction – Jean 4.1-26

 

 

 

Par Jonathan SPENCERTexte condensé par Françoise Lombet

 

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L’un des livres bibliques qui insistent le plus sur la mission est l’évangile de Jean.

Son récit commence par l’annonce de la venue de la lumière. L’envoyé par excellence, le plus grand missionnaire de tous les temps, ce n’est pas nous, mais Jésus !

L’évangile se termine avec ce même Fils, désormais ressuscité, disant : comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Ces deux axes de la mission – celle de Jésus et puis la nôtre – se révèlent dans le chapitre 4 de Jean où l’on voit naître une foi exemplaire… En Samarie !

C’est là que commencera la moisson de Jésus.

 

 

Un besoin

 

Comparons la femme samaritaine et Nicodème. Tout les oppose. Il est nommé, elle est anonyme. Il est un homme, elle, une femme. Un entretien de nuit, l’autre à midi. Lui est moralement irréprochable, elle a eu 5 mariages ratés. Il est un aristocrate, représentant le plus éminent de la religion juive, elle, une paysanne issue d’un peuple détesté. Tout les oppose sauf que l’un comme l’autre a désespérément besoin de celui qui connaît et comble les coeurs.

La femme samaritaine a deux problèmes : elle est une femme et elle est samaritaine. Un puits (v.6-19) et une montagne (v.20-26) dominent le récit, deux repères pour sensibiliser aux besoins de la femme.

 

 

D’abord, le puits (v.3-18)

 

À l’époque des patriarches, un voyageur d’un pays lointain (Jacob) arrive épuisé et assoiffé au bord d’un puits. Une jeune femme des environs vient à sa rencontre et lui offre à boire. Par la suite elle l’invite à rentrer au village, où le voyageur célèbre un repas de fiançailles, se fait héberger par sa famille, avant de repartir. Que se passe-t-il en Jean 4 ? Un peu la même chose, mais au lieu d’être une Rachel, une jeune fille bien comme il faut, la Samaritaine est dans une situation sentimentale catastrophique.

Et l’union qui sera célébrée au village n’est pas le mariage de Jésus et la Samaritaine, mais l’union entre Jésus et les croyants de Samarie.

 

 

Deuxième lieu : la montagne (v.20)

 

Elle est la source d’une dispute millénaire. Suite à la division des royaumes d’Israël et de Juda dans l’AT, le Royaume du Nord se fait envahir par l’Assyrie. Les habitants du Nord (Samarie) s’entendent avec leurs conquérants pour rester sur place à condition de marier leurs enfants avec ceux des Assyriens, une démarche strictement interdite dans l’AT. Le peuple samaritain est né, mijuif, mi-assyrien. Ces mariages mènent au rejet du temple historique juif construit sur la colline de Jérusalem. Les Samaritains se construisent un temple rival sur une autre montagne chez eux en Samarie, le mont Garizim, montagne visible depuis le puits de Jacob. Et dans ce temple ils pratiquent l’idolâtrie, comparée dans l’AT à… l’adultère, l’infidélité sexuelle. Ce que cette femme a fait littéralement n’est que le reflet de ce que son peuple a fait spirituellement sur la montagne. Le besoin et le problème sont soulignés par la géographie, par le puits et la montagne. Une femme privée de satisfaction dans la vie, issue d’une nation privée d’intimité avec Dieu.

 

 

Une offre

 

Jésus est un homme juif. Que va-t-il offrir à cette femme samaritaine, devant ce puits, en face de cette montagne ? Quelle est sa mission ? Il va lui donner précisément ce dont elle est privée : satisfaction dans la vie et intimité avec Dieu, en lui offrant la même chose qu’à Nicodème : l’eau (v.7-18) et l’Esprit (v.19- 26).

 

Tout découle de l’image de l’eau sur trois niveaux :

* Voyons d’abord l’inversion des rôles (v.7-10). Qui a soif ? Qui est dans le besoin ? Pas Jésus, mais la femme. Il commence à la chercher… Si tu savais quel est le cadeau de Dieu et qui est celui qui te dit : « Donne-moi à boire », tu lui aurais toi-même demandé à boire et il t’aurait donné de l’eau vive.

Pour elle l’eau vive c’est l’eau de source, l’eau qui ne stagne pas, l’eau potable. C’est le premier niveau de compréhension de l’eau vive : H2O, ce qui désaltère. D’où la question du v.11 : Tu n’as rien pour puiser et le puits est profond. D’où aurais-tu donc cette eau vive ? Cela représente déjà un défi impossible aux yeux de la femme (v.12) : Serais-tu plus grand que notre ancêtre Jacob ? Celui-ci est le héros national, qui a creusé ce puits millénaire où tout un peuple s’abreuve depuis 1 500 ans !

 

* Deuxième niveau du sens de l’eau vive (v.13-14) : Toute personne qui boit de cette eau-ci aura encore soif. En revanche, celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillira jusque dans la vie éternelle. Plus de doute, Jésus parle d’autre chose que d’H2O. Mais l’interlocutrice n’a pas compris. Elle est restée au premier degré alors que Jésus lui offre une satisfaction existentielle, éternelle, l’objet de sa mission. Elle répond (v.15) : Seigneur, donne-moi de cette eau-là.

Qu’est-ce qui permet à cette femme de comprendre que Jésus parle à un deuxième niveau ? Elle réalise que Jésus connaît son coeur ! Tout à coup Jésus semble changer de sujet (v.16-18). Quel rapport entre l’eau et sa vie conjugale ? La soif.

Que retient-elle de cet entretien avec Jésus ? Que raconte-t-elle à ses amis au village ? Au v.29 elle dit : Venez voir un homme qui m’a dit ce que j’ai fait. Si Jésus connaît son coeur, ne serait-ce pas lui qui peut aussi le combler ?

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* On passe sans transition aux versets 20 à 26, du puits à la montagne, avec un troisième niveau de sens de cette eau vive offerte par Jésus. Jusqu’à présent tout est symbole, tout est métaphore.

Quelle est donc cette eau qui étanche la soif ? C’est l’Esprit donné aux croyants. Repensons à Nicodème et à l’association au chapitre 3 de l’eau et de l’Esprit. Dans quel but ? Pour naître de nouveau, c’est-à-dire devenir enfant de Dieu. La source de cette satisfaction, qu’aucune relation humaine ne pourra nous procurer, est Dieu et l’intimité avec lui, rendue possible par l’envoi de son Esprit. Au v.19 la femme change de sujet. Nos ancêtres ont adoré sur cette montagne et vous dites, vous, que l’endroit où il faut adorer est à Jérusalem. Deux temples, deux religions, deux lieux sacrés. Comment choisir ?

Femme, lui dit Jésus, crois-moi, l’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Peu importe l’origine du salut (v.22), il est désormais offert à TOUS (v.23). Mais l’heure vient, et elle est déjà là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité. En effet, ce sont là les adorateurs que recherche le Père.

 

On ne rencontre plus Dieu dans un temple, dans une église, un lieu de culte. On ne le trouvera ni sur le mont Sion à Jérusalem ni à Garizim en Samarie.

Jésus aura soif ailleurs dans cet évangile. Au chapitre 19, souvenez-vous de son cri alors qu’il agonise sur une croix. J’ai soif ! Lui, qui a offert l’eau vive qui étanche la soif à jamais, est assoiffé. Il traverse le désert, connaît la soif ultime afin que nous connaissions la satisfaction suprême. Il est séparé de Dieu afin que nous connaissions l’intimité avec lui.

La soif au bord du puits et le temple sur la montagne nous dirigent inexorablement vers une seule et même destination, à la croix, là où la rencontre avec Dieu devient possible. Et c’est pour cela que son dernier cri sera tetelestai : « mission accomplie ».

 

 

Conclusion

 

   – Comment se porte votre coeur ? Jésus le connaît et veut le combler. Avant de songer à partir en mission, est-ce que vous êtes au bénéfice de sa mission envers vous ?

   – Où trouvez-vous votre satisfaction ? Où cherchez-vous le réconfort quand cela ne va pas ? La seule source de satisfaction véritable, c’est Christ.

   – Et votre intimité avec Dieu ? À quoi pensez-vous en premier au réveil ?

   – Cette proximité avec Dieu est-elle une théorie ou une réalité quotidienne ?

 

L’Esprit nous conduit à la croix, à ce temple nouveau, le lieu de rencontre entre Dieu et les hommes. C’est le seul endroit où l’offre de Jésus répond à notre besoin. L’endroit où Dieu lui-même cherche des hommes et des femmes de toute langue et toutes nations pour leur offrir l’intimité avec lui qui connaît et comble tous les coeurs.

Conscients de sa mission envers nous, nous serons alors qualifiés pour partir nous-mêmes en mission.

 


NOTES

1. Jonathan Spencer est missionnaire anglais, engagé dans l’équipe d’implantation de l’Église Saint-Cyprien de Toulouse.