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Courrier du Tchad

 

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Dieu est pour nous un rempart, il est un refuge, un secours toujours offert lorsque survient la détresse… (Ps 46.1)

 

Par Evelyne Felix

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Lundi 15 Juin 2015, 9H30 : Nous sommes en pleine réunion avec des femmes vivant avec le VIH au siège de notre dénomination. Une des femmes reçoit un appel lui annonçant qu’il se passe quelque chose vers l’hôpital et l’École de Police. D’autres appels suivent, il y a un peu de confusion jusqu’à ce que, grâce à un parent proche, ma collègue Marie N nous livre la vérité : deux attentats ont eu lieu simultanément ce matin ; l’un au Commissariat principal, l’autre à l’École de Police. On parle de trente-huit morts (peut-être plus), surtout à l’École de Police où une voiture blindée a explosé en plus du kamikaze.

 

Les femmes sont sous le coup. Nous apprenons que des barrages de contrôle sont mis en place du côté Est de la ville, empêchant les véhicules de sortir et d’entrer. Nos soeurs s’inquiètent d’un parent présent à l’école de police, de savoir comment elles vont rentrer chez elles… Déjà elles veulent partir. Nous les retenons, prions ensemble, terminons calmement la réunion avant de nous séparer. S’agit-il d’un attentat isolé seulement ?

 

Depuis ce jour, des contrôles sont pratiqués à certains carrefours de la ville et des militaires et membres du GMIP stationnent devant des édifices importants (ambassades, etc…). À part cela, la circulation est quasiment normale dans la capitale. Au dehors, sur les grands axes routiers, des contrôles s’intensifient aussi à certains endroits mais ils se pratiquaient déjà avant.

 

Samedi 27 juin, 5h00 du matin : des patrouilles de policiers + GMIP encerclent notre quartier (Sabangali) et fouillent les maisons une par une. Vers 8 heures, les voilà dans notre rue. Je suis justement en train d’accueillir dehors les 2 premiers participants du groupe d’étude biblique venus pour une retraite ce matin-là. Le policier passe la porte d’entrée de la maison, demande qui habite là et s’il y a des hommes. Sur ma réponse négative, il n’insiste pas et s’en va. Mais quelques habitants du quartier sont embarqués dans leur véhicule. Tout individu qui n’a pas sa carte d’identité sur lui ou si celle-ci est périmée, est arrêté.

 

tchad-2015Une nouvelle explosion très tôt ce lundi 29 juin à 5 heures du matin dans un quartier nord de la ville démontre la dureté de la lutte contre les terroristes : alors que les policiers s’apprêtaient à perquisitionner une maison signalée pour être un de leurs repaires, un des malfaiteurs, se voyant démasqué, s’est fait exploser, tuant 5 policiers et 5 autres membres du mouvement terroriste. Depuis, la chasse s’est intensifiée : 2 autres kamikazes ont été repérés et arrêtés à Bongor (à 230 km au sud de N’Djaména) et des caches d’armes démasquées dans la capitale. Les contrôles se multiplient surtout sur les marchés, ce qui amène une certaine tension, s’ajoutant à la plus grande sensibilité des musulmans durant cette période de ramadan.

 

La sensibilisation à la sécurité se généralise dans tout le pays. La zone du Lac Tchad, frontalière avec le Nigéria, le Niger et le Cameroun, est particulièrement visée. Mais pour l’instant, les missionnaires tchadiens de cette zone comme des autres régions, sont à leur poste.

 

Les églises évangéliques de l’Entente ont été appelées à la prière et à la vigilance. Un service de sécurité est mis en place à l’entrée de certaines communautés, surtout le dimanche matin. Certaines églises catholiques utilisent des détecteurs et fouillent systématiquement les hommes en djellabas.

 

Une certitude : ces évènements ne se produisent que maintenant ! En effet, la menace était là depuis la fin de 2014. Nous sommes convaincus que c’est Dieu qui a exaucé les nombreuses prières qui lui ont été adressées en protégeant la capitale et le pays ces derniers mois et en écartant des attentats plus graves. Nombreux étaient les chrétiens et églises en prière ce premier trimestre 2015. Peut-être que Dieu permet ces évènements de ces jours-ci pour que nous renouvelions notre vigilance dans la prière et que nous continuions à apprendre à ne compter que sur lui. Et aussi pour dévoiler ce dont chacun se doutait, l’infiltration des Boko Haram parmi les tchadiens. Nous prions pour eux aussi.

 

Eveline FELIX